Verset d’al-Ikmâl

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Verset d’Ikmâl, verset 3, Sourate 5

Verset d’al-Ikmâl (en arabe: آیه الإکمال) est le troisième verset de la Sourate al-Mâ'ida portant sur l’événement de Ghadir, révélé au Noble Prophète. Dieu dit dans ce verset avoir parachevé après la révélation de ce verset, la religion et le bienfait. Il y a des divergences au sujet du jour où le verset a été révélé ; certains considèrent qu’il a été révélé pendant le jour de l’‘Arafah et d’autres considèrent le 18 dhu al-Hajjah de l’an 10 de l’hégire lunaire comme le moment de sa révélation. Les chiites estimes à l’unanimité que le verset concerne l’événement de Ghadîr Khumm et la désignation d’‘Ali comme maître (wali).

Verset

Voici le verset :

الْيَوْمَ أَكْمَلْتُ لَكُمْ دِينَكُمْ وَأَتْمَمْتُ عَلَيْكُمْ نِعْمَتِي وَرَضِيتُ لَكُمُ الْإِسْلَامَ دِينًا ۚ ﴿٣﴾
Aujourd'hui, j'ai parachevé votre religion et vous ai accordé Mon entier bienfait. J'agrée pour vous l'Islam, comme religion.
Le Coran, Sourate V, Verset 3 ; Traduction du Coran, Régis Blachère, p.132.

Circonstances de la révélation

Dans les sources historiques et les sources de hadith (chiites et sunnites), il n’existe que deux catégories de rivâyat sur le moment de la révélation du verset : Sa révélation durant le pèlerinage de l’Adieu est certaine, mais certains ont dit qu’il a été descendu en le jour de l’‘Arafah, d'autres considèrent le jour de l’événement de Ghadîr comme le moment où il a été révélé.

Jour de l’‘Arafah

Al-Kulaynî dans son célèbre œuvre al-Kâfî écrit que le verset a été révélé en le jour de l’‘Arafah ajoutant que la révélation a eu lieu pour annoncer la Wilâyat de l’Imam ‘Ali.[1]

L’Allâmeh Majlisî estime que les documents de ce rivâyat sont faibles et le texte peut avoir été falsifié.[2]

Dans son exégèse, ‘Ayâshî cite, pour sa part, l’Imam Sâdiq :

Quand le Prophète s’installa vendredi à ‘Arafah, l’Ange Gabriel est descendu chez lui pour dire : O Mohammad ! Dieu te transmet ses salutations et te demande de dire à ta communauté : «الیوم أکملت لکم دینکم Aujourd’hui j’ai parachevé votre religion par la wilâyat d’‘Ali b. Abi Tâlib » et «واتممت علیکم نعمتی و رضیت لکم الاسلام دیناً je vous ai accordé Mon entier bienfait. J’agrée pour vous l’Islam comme religion. Et que désormais il n’y aura plus de révélation. »[3]

Précisons qu'il existe dans la chaîne de transmission de ce récit, Ja’far b. Mohammad al-Khazâ’ï à l’identité inconnue.[4]

De même, certaines sources sunnites, y compris Ibn Kathîr, dans ses deux livres d’exégèse et d’histoire, estiment que le verset a été révélé en le jour de l’‘Arafah.[5][6]

Dix-huitième jour de dhu al-Hajjah

Selon les récits, ce verset a été révélé le jour de Ghadîr Khumm ou un peu plus tard. Ces récits se voient dans les sources chiites authentiques.[7][8]

Certaines sources sunnites font également allusion à ce que ce verset a été révélé à Ghadîr Khumm, cependant ces sources sont considérées comme moins bien fondées par certains sunnites.[9][10] Néanmoins dans la chaîne de transmission de ces récit, il existe des personnalités considérées comme dignes de confiance par les savants et transmetteurs de hadith.[11]

Réunion des deux jours

Certains pensent que le verset a été révélé deux fois : la première fois lors du jour de ‘Arafah, où le Prophète était inquiet, pour certaines raisons, de se qu'il annonçait (et ce qui fut d'ailleurs, d'après certain, la raison de la révélation du verset de Tablîgh); la seconde fois fut lors du jour de l’événement de Ghadîr où le verset d’Ikmâl a été révélé.[12]

Raisons de la révélation

D'après les chiites

Les chiites pensent à l’unanimité que le verset d’Ikmâl porte sur l’événement de Ghadîr et la désignation d’‘Ali b. Abî Tâlib comme le succésseur du Prophète.[13][14]

Au point de vue sunnites

Certaines sources sunnites annoncent que le verset a été révélé lors du jour de l’‘Arafah.[15][16][17]

Allâmeh Amînî dans son ouvrage Al Ghadîr ainsi que Mîr Hâmid Husayn dans son ouvrage ‘Abaqât al-Anwar ont fait des études sur les livres des savants sunnites, présentant de nombreux témoignages qui confirment que le verset est lié à la succession du Prophète par ‘Ali.

Analyse du verset

D'après les spécialistes de hadith et des commentateurs du Coran, quand le verset du Tablîgh a été révélé à Ghadîr Khumm, le Prophète a nommé ‘Alî b. Abî Tâlib comme Walî et Calife après lui et le verset d’Ikmâl a été révélé et le Prophète avait dit :

الله اکبر علی اکمال الدین و اتمام النعمة و رضا الرب برسالتی و ولایة علی بن ابیطالب من بعدی

Je témoigne que Dieu est le plus Grand, parce qu’il a parachevé la Religion et accordé Son entier bienfait et qu’Il est Satisfait de ma mission et du choix d’‘Alî b. Abi Tâlib comme mon succésseur.[18][19][20][21]

Sur cette même base, la question de la succession du Prophète par ‘Alî b. Abî Tâlib est le dernier devoir à propos duquel il y a eu une révélation et rien n’a été révélé après cela sauf le verset d’Ikmâl .[22]

Explication des vocabes

Signification du temre : Yaum

Le terme « Yaum » (یوم) dans ce verset qui a déçu les mécroyants, renvoie au jour du parachèvement de la religion et de l’accord par Dieu de Son entier bienfait, cependant il existe des divergences au sujet du jour du parachèvement de la religion et de l’accord du bienfait divin :

  • Conquête de la Mecque : certains ont considéré que ce jour fut le jour de la conquête de la Mecque,[23][24] mais puisque le parachèvement de la religion dépend du parachèvement des dogmes de la religion, ce point de vue ne peut pas être acceptable, parce que de nombreux dogmes de la religion ont été formulés après la conquête de la Mecque.[25]
  • Après la guerre de Tabûk : certains considèrent que le terme « yaum » dans ce verset renvoie au jour de la guerre de Tabûk, parce que ce fut le jour où la sourate Barâ’at a été révélée les traditions de l’époque de l’ignorance ont été supprimées.[26] Ce point de vue ne peut pas être acceptable non plus, parce que la révélation de la sourate Barâ’at précède celle de la sourate « Table servie » qui donne lieu à la définition de plusieurs dogmes religieux.[27]
  • Jour de 'Arafah : Bukhârî, Muslim et certains d’autres savants sunnites considèrent le jour de l’‘Arafah comme le jour que « yaum » représente.[28]

Si on entend par yaum, le jour de l’‘Arafah, la question suivante se pose: pourquoi en ce jour la religion a été parachevée et le bienfait accordé? Puisque que même après le jour de l’‘Arafah de l’an 10 H., il y a eu des dogmes à légiférer. ‘Umar b. Khattâb dit : “L’interdiction de l’usure a été dictée comme règle après le pèlerinage de l’Adieu.”[29][30]

  • Le jour de Ghadîr Khumm: le seul jour qui peut être considéré comme celui du parachèvement de la religion et de l’offre de l’entier bienfait, ce qui a d’ailleurs déçu les mécroyants, est le jour l’événement de la succession du Prophète par ‘Alî c'est à dire le jours de l’évément de Ghadîr Khumm.

Différence entre les deux termes de Itmâm et de Ikmâl

  • le terme Itmâm (complétude) s’emploie là où les éléments d’une même chose se succèdent et complètent la chose. Ainsi lorsque cette succession n’est pas accomplie, cette chose ne sera pas faite. Quand le dernier élément la rejoint, on dit qu’elle est donc complète (tamâm).
  • le terme Ikmâl. L'explication précédente n’est pas valide pour le terme Kâmil [c'est à dire : chose pleine mais pas nécessairement achevée], puisqu'il se peut qu’il ne lui manque rien, sans être complète pour autant.

En fait, la différence entre Kâmil et Tamâm vient d’une différence de qualité (pour le terme Kâmil) et de quantité (pour le temre Tamâm). Le Coran dit d’une part : J’ai parachevé en ce jour votre religion et de l’autre part, il dit : Je vous ai accordé mon entier bienfait.[31]

Voir aussi

Références

  1. Kulaynî, Kâfî, vol. 1, p. 259, hadith n° 6
  2. Majlisî, Bihâr al-Anwâr, vol. 3, pp. 259-261
  3. ‘Ayâshî, Kitâb al-Tafsîr, vol. 2, p. 9, hadith n° 1108
  4. Khu’ï, Mu’jam Rijâl al-Hadith, vol. 4, p. 126, hadith n° 2296
  5. Ibn Kathîr, Tafsîr al-Qur’ân al-Azîm, vol. 2, p. 12-13
  6. Al-Bidâyat wa al-Nihâyat, vol. 5, p. 155
  7. Kâfî, vol. 1, pp. 289-292
  8. Bahrânî, Al Burhân fî Tafsîr al-Qur’ân, vol. 1, pp. 434-447
  9. Tafsîr al-Qur’ân al-Azîm, vol. 2, p. 14
  10. Suyûtî, Al-Dur al-Manthûr, vol. 3, p. 19
  11. Amînî, Al-Ghadîr, vol. 1, pp. 294-298
  12. Al Sahîh, vol. 31, p. 311
  13. Al Mizân, vol. 5, p. 169 et les pages suivantes
  14. Al Huwayzî, Nûr al-Thaqalayn, vol. 1, p. 590
  15. Al Yaqîn, chap. 127, p. 344
  16. Anwâr al-Tanzîl, vol. 1, p. 255
  17. Alûsî, Rûh al-Ma’ânî, vol. 4, pp. 90-91
  18. Tabarî, Bishârat al-Mustfâ, p. 211
  19. Husaynî Astarâbâdî, Ta’wîl al-Ayât al-Zahira, p. 152
  20. Haskânî, Shawâhîd al-Tanzîl, vol. 1, p. 201
  21. Ibn Tâwûs, Al-Tarâ’if, vol. 1, p. 146
  22. Bahrânî, Al Burhân, vol. 1, p. 424
  23. Tafsîr Samarqandî, vol. 1, p. 393 citant Al Sahîh min Sîrah al-Nabî al-A’zam, vol. 31, p. 304
  24. Qurtabî, Al Jâmi’ li Ahkâm al-Qurân, citant Al Sahîh min Sîrah al-Nabî al-A’zam, vol. 31, p. 304
  25. Al Sahîh, vol. 31, p. 304
  26. Al Mizân, vol. 5, p. 169
  27. Al Sahîh, vol. 31, p. 305
  28. Al Sahîh, vol. 31, p. 305
  29. Sahîh Muslim, vol. 2, p. 81, et vol. 5, p. 8
  30. Al Ghadîr, vol. 6, p. 127
  31. Imâmat wa Rahbarî, p. 88-89

Bibliographie

  • Alûsî, Mahmûd, Rûh al-Ma’ânî fî Tafsîr al-Qur’ân al-‘Azîm wa al-Sab’ al-Mathânî, Muhammad Husayn al-‘Arab, Dar al-Fikr, Beyrouth, 1417 de l’hégire lunaire.
  • Ibn Kathîr, Al Bidâyat wa al-Nihâyat, par ‘Alî Najîb ‘Atwî et les autres, Dar al-Kutub al-‘Ilmîya, Beyrouth, 1408 de l’hégire lunaire.
  • Ibn Kathîr, Ismâ’îl, Tafsîr al-Qur’ân al-Azîm (exégèse d’Ibn Kathîr), Beyrouth, 1402 de l’hégire lunaire.
  • Amînî, ‘Abd al-Husayn, Al Ghadîr fî al-Kitâb wa al-Sunnat wa al-Adab, Téhéran, 1366 de l’hégire solaire.
  • Bahrânî, Sayid Hâshim, Al Burhân fî Tafsîr al-Qur’ân, Qom, Mu’asisat al-Bi’that, 1415 de l’hégire lunaire.
  • Bayzâwî, ‘Abdullâh, Anwâr al-Tanzîl wa Asrâr al-Ta’wîl, (Exégèse de Bayzâwî), Dar al-Kutub al-‘Ilmîya), Beyrouth, 1408 de l’hégire lunaire.
  • Hâj Sayid Jawâdî, Ahmad Sadr et autres, Dâyirat al-Ma’ârif Tashayyo’, Téhéran, éd: Shahîd Sa’ïd Muhibbî, 1375 de l’hégire solaire.
  • Haskânî, Hâkim, Shawâhid al-Tanzîl, Mu’asisi Châp wa Nashr, 1411 de l’hégire lunaire.
  • Huwayzî, ‘Abd ‘Alî, Nûr al-Thaqalayn, corrigé par Sayid Hâshim Ansârî, 1349 de l’hégire solaire.
  • Husaynî Astarâbâdî, Sayid Sharaf al-Dîn, Ta’wîl al-Ayât al-Zahirah, Qom, Jâmi’I Mudarrisîn, 1409 de l’hégire lunaire.
  • Khuï, Sayid Abu al-Qâsim, Mu’jam al-Hadîth wa Tafsîl Tabaqât al-Rawât, Manshûrât Ayatollah al-‘Uzmâ Khuï, Qom, 1403 de l’hégire lunaire.
  • Sayid b. Tâwûs, Al-Tarâ’if, imprimerie Khayyâm, 1400 de l’hégire lunaire.
  • Sayid b. Tâwûs, Ibn Tâwûs, ‘Alî, Al Yaqîn bi al-Ikhtisâs Mulânâ ‘Alî bi Amrat al-Mu’minîn, par Ansârî, Qom, Dar al-Kutub, 1413 de l’hégire lunaire.
  • Suyûtî, Jalâl al-Dîn, Al Durr al- Mansûr fî al-Tafsîr bi al-Mâthûr, Dar al-Fikr, Beyrouth, 1403 de l’hégire lunaire.
  • Tabâtabâï, Muhammad Husayn, Al Mîzân fî Tafsîr al-Qur’ân, Manshûrât Jâ’mi’at al-Mudarrisîn, Qom.
  • Tabarî, ‘Imâd al-Dîn, Bishârat al-Mustafâ, Najaf : Bibliothèque Haydarîya, 1383 de l’hégire lunaire.
  • ‘Amilî, Sayid Ja’far Murtizâ, Al Sahîh min Sirat al-Nabî al-A’zam, Dar al-Hadîth, Qom, 1385.
  • ‘Ayâshî, Muhammad, Kitâb al-Tafsîr, par Mu’asisat al-Ba’that, Qom, 1421 de l’hégire lunaire.
  • Kulaynî, Muhammad b. Ya’qûb, Al Kâfî, par ‘Alî Akbar Ghaffârî, Dar al-Kutub al-Islâmîya, Téhéran, T al-Thâlitha, 1388 de l’hégire lunaire.
  • Majlisî, Muhammad Bâqir, Bihâr al-Anwâr al-Jâmi’at li Darar al-Akhbâr al-A’imat al-Athâr, Shirkat Tab’ Bihâr al-Anwâr, Téhéran.
  • Mutahhaarî, Murtazâ, Imâmat wa Rahbarî, Téhéran : éd. Sadrâ, 1366