Isrâf

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Isrâf (en arabe : «اسراف») ou le gaspillage , signifie un dépassement des limites et la perte de l’équilibre. Cette question a été discutée au niveau de la jurisprudence, de la morale et du Coran qui l’interdit ainsi que les hadiths. Certains ont considéré son interdiction comme un principe essentiel de la religion et d’autres l'ont classé parmi les péchés capitaux.

L’Imam as-Sâdiq (a) a dit :لِلمُسرِفِ ثَلاثُ عَلاماتٍ: يَشتَرى ما لَيسَ لَهُ وَ يَلبِسُ ما لَيسَ لَهُ و َيَاكُلُ ما لَيسَ لَهُ, «Le gaspilleur a trois particularités : il achète ce qui n’est pas à sa hauteur, il porte ce qui n’est pas à sa hauteur et il consomme ce qui n’est pas à sa hauteur.»

Définition

Le gaspillage signifie, sortir des limites de l’équilibre et avoir tendance à exagérer dans un sens ou dans l’autre[1].

Le terme gaspillage est généralement plus utilisé dans le sens d'« exagération » et non dans le sens de « manquement »[2] et est considéré comme l’antonyme « d’avarice » et de « parcimonie »[3].

Juste milieu et le gaspillage

Le juste milieu se situe entre le gaspillage et l’avarice, et a un sens relativement différent en fonction des personnes, du temps et du lieu. Les spécialistes de la jurisprudence considèrent que toute action raisonnable n’est pas du gaspillage dans le sens où elle ne met pas en danger l’équilibre et reste dans le juste milieu[4], contrairement aux dépenses excessives qui pour les penseurs, sont des manifestations du gaspillage[5].

Statut du gaspillage dans la jurisprudence islamique

Le gaspillage est haram[6], c’est à dire interdit et certains considèrent cette interdiction comme un principe de la religion[7] ou un péché capital[8].

Dans les livres de règles religieuses, une discussion spéciale au sujet du gaspillage n’a pas été présentée, mais ce sujet a été introduit au cœur d’autres questions concernant les pratiques religieuses, les accords, la juridiction et les statuts des actes selon l’islam. Certains ont rédigé des recueils de règles religieuses sur ce sujet[9].

Terme Isrâf dans le Coran

Le mot Isrâf et ses homonymes sont cités 23 fois dans le Coran[10][11] et le mot Tabdhir qui signifie dilapidation des richesses et ses homonymes sont cités trois fois dans le Coran notamment dans la sourate al-Isrâ’ aux versets 26-27 :

وَآتِ ذَا الْقُرْبَى حَقَّهُ وَالْمِسْکِینَ وَابْنَ السَّبِیلِ وَلا تُبَذِّرْ تَبْذِیرًا ﴿٢٦﴾ إِنَّ الْمُبَذِّرِینَ کَانُوا إِخْوَانَ الشَّیَاطِینِ وَکَانَ الشَّیْطَانُ لِرَبِّهِ کَفُورًا ﴿٢٧﴾
« Et donne au proche parent ce qui lui est dû ainsi qu'au pauvre et au voyageur (en détresse). Et ne gaspille pas indûment, car les gaspilleurs sont les frères des diables ; et le Diable est très ingrat envers son Seigneur ».
sourate al-Isrâ’, versets 26-27

Différence entre gaspillage et dilapidation

Le mot Isrâf a un sens très étendu et concerne toutes les déviations idéologiques, morales, sociales, économiques[12], mais le mot Tabdhir s’applique plutôt aux domaines financiers et économiques[13].

Le terme Isrâf (gaspillage) peut signifier une exagération dans les actes loisibles (mubãḥ), c’est à dire ni recommandés ni déconseillés, comme le fait de trop manger alors que manger dans la mesure nécessaire, est une action permise et même recommandée, ou une consommation déplacée même dans une petite mesure comme le fait de jeter la nourriture qui est interdit même en petite quantité[14].

Par conséquent, le mot Isrâf a un sens qualitatif et quantitatif, mais le mot Tabdhir a plutôt un sens qualitatif et concerne une consommation déplacée comme le fait de donner l’aumône à quelqu’un pour l’aider à faire un acte interdit[15], alors que ce terme n’a jamais été employé pour signifier une exagération dans les bonnes actions comme l’aumône[16].

C’est pour cette raison que l’Imam as-Sâdiq (a) a considéré cet acte déplacé comme une forme de gaspillage[17] et même pire que le gaspillage[18].

وَالَّذِینَ إِذَا أَنْفَقُوا لَمْ یُسْرِفُوا وَلَمْ یَقْتُرُوا وَکَانَ بَیْنَ ذَلِکَ قَوَامًا ﴿٦٧﴾
Qui, lorsqu'ils dépensent, ne sont ni prodigues ni avares mais se tiennent au juste milieu
sourate al-Furqân (Le discernement), verset 67

Terme Qavam (juste milieu) dans le Coran

Le terme Qavâm qui signifie « le juste milieu » a aussi été cité dans le Coran[19], et est la limite qui distingue une consommation correcte du gaspillage en fonction de la raison, des règles religieuses ou de la coutume[20].

Le gaspillage qui est toujours présenté comme une exagération ou un manquement, en opposition aux commandements divins[21], est en relation directe avec la corruption[22], car il est responsable d’un déséquilibre et de la corruption[23] c’est pour cette raison que le gaspillage qui détruit les possibilités et les possessions de l’être humain, est en arabe l’homonyme du terme "Sorfa" qui signifie « le ver qui ronge l’arbre de l’intérieur »[24].

Références

  1. Majma’-ol-Bayân, vol. 4, p.176
  2. Al Tahghigh, vol. 5, p. 110
  3. Jame’-ol-Bayân, vol. 4, p. 337
  4. Mostanad al ‘Orwa, vol. 2 ,p. 239
  5. Awâ’ed al Ayâm, p. 635
  6. Al Sarâ’er, vol. 1, p. 440
  7. Awâ’ed al Ayâm, p. 635
  8. Jawâ’er al kalâm, vol. 13, p. 320
  9. Awâ’ed al Ayâm, p. 635
  10. Al Mo’jam al Ahsâ’i, vol. 1, p. 454
  11. Lisân al ‘arab, vol. 9, p. 149
  12. Al Tafsir al Kabir, vol. 9, p. 28
  13. Mofradât, p. 40 et Al Furqân, vol. 15, p. 165
  14. Tafsir al-Qurtubi, vol. 7, p. 123-125
  15. Al Furqân, vol. 15, p. 165
  16. Al Tahrir wa al Tanwir, vol. 15, p. 79
  17. Wasā'il al-Shī’a, vol. 9, p. 46
  18. Al forûgh, p. 115
  19. sourate al Furqân, verset 67
  20. Tafsir al Manâr, vol. 6, p. 351
  21. Tafsir nemûna, vol. 15, p. 308
  22. Tafsir nemûna, vol. 15, p. 9
  23. Tafsir al Manâr, vol. 6, p. 352
  24. Lisân al ‘arab, vol. 6, p. 245