At-Tahrîm bi ar-Ridâ‘

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At-Tahrîm bi ar-Ridâ‘ (en arabe : التحريم بالرضاع) est un type de devenir Mahram qui se réalise entre deux personnes ou plus par le fait de l'allaitement et sur la base de laquelle leur mariage l’un avec l’autre n'est pas permis. Par exemple, lorsqu'un garçon nouveau-né est allaité par le lait d'une femme, et dans ce cas, ce nouveau-né devient Mahram pour cette femme et après, il ne peut pas l’épouser.
« At-Tahrîm » traduit en français : le fait de devenir Mahram et Mahram est une personne avec qui le mariage est interdit à cause du lien proche de parenté ; « bi » signifie par et « ar-Ridâ‘ » traduit l'allaitement. Alors, at-Tahrîm bi ar-Ridâ‘ signifie : devenir Mahram par allaitement.
Ce type de devenir Mahram a des conditions, dont le fait que la femme allaitante soit tombée enceinte de façon légitime selon la loi religieuse et le lait dans le sein de cette femme doit être produit par une relation conjugale licite, que l'allaitement soit multiple et consécutif et qu'entretemps l'enfant ne se nourrisse pas du lait d'une autre femme ou d'un autre aliment et que l'âge de l'enfant allaité soit inférieur à deux ans lunaires (une année lunaire a 354 ou 355 jours.).

Les personnes qui deviennent Mahram les unes aux autres par l’allaitement s'appellent les Mahram de lait, et des préceptes spécifiques tels que l'interdiction du mariage entre eux s'appliquent. Dans ce type de devenir Mahram qui se réalise par allaitement, si le nourrisson est un garçon, il devient Mahram avec la femme qui l’allaita (la mère de lait), ainsi qu’avec sa mère, sa grand-mère, sa soeur, sa fille, sa petite-fille, sa tante paternelle et ses tantes maternelles et après, il ne peut jamais se marier avec elles ; et si le nourrisson est une fille, elle devient Mahram avec le mari de la femme qui l’allaita (le père de lait), son père, son grand-père, son oncle paternel, son oncle maternel, son fils et ses petit-enfants et après, elle ne peut jamais se marier avec eux. De même, le frère, l’enfant, le petit-enfant, le père, le grand-père, l’oncle paternel et l’oncle maternel de cette femme deviennent Mahram avec cette fille allaitée.

Certains juristes sunnites considérent l'allaitement de l'adulte (l'allaitement d'un homme au sein d'une femme non-Mahram) comme une cause de devenir Mahram. La plupart des juristes sunnites et tous les juristes chiites s'opposent à ce précepte et le considèrent comme illicite et interdit.

Sens du concept

At-Tahrîm bi ar-Ridâ‘ (le fait de devenir Mahram par l’allaitement) est un type de parenté qui se réalise par le fait de l'allaitement entre deux personnes ou plus et sur la base de laquelle le mariage entre eux est interdit.[1] Autrement dit, quand un enfant est allaité par une femme non-Mahram, cet enfant devient Mahram avec cette femme et son mari. Outre cette femme et son mari, d'autres personnes deviennent également Mahram pour cet enfant, ce qui sera mentionné ci-dessous.

Les Mahram de lait ou les Maharam par allaitement sont des personnes qui acquirent une parenté par le fait de l'allaitement et qui deviennent Mahram l'une pour l'autre. Sur cette base, des préceptes spécifiques comme l'interdiction du mariage entre elles s'appliquent.[2]
A Propos de cette question dans les textes de fiqh, il existe trois expressions :

  1. « Al-Murtadi‘ » : l'enfant qui s'est nourri du lait d'une femme autre que sa mère dans des conditions spécifiques.
  2. « Al-Murdi‘a » : la femme qui allaite le bébé.
  3. « Al-Fahl » : l'homme dont la femme qui allaite est tombée enceinte).[3]

Conditions

Les juristes chiites, en se basant sur les versets du Coran et les hadiths des Imams infaillibles (a), mentionnèrent des conditions pour la réalisation de devenir Maharam par l’allaitement[4] :

  • Le lait consommé par le bébé doit provenir d’une grossesse licite et halal, c’est-à-dire la femme qui allaite doit être tombée enceinte de façon licite selon la loi religieuse.[5]
  • L'enfant doit téter suffisamment pour que sa chair pousse et que ses os se solidifient.[6]
  • L'enfant doit téter pendant au minimum une journée entière le lait de la femme allaitante, et pendant cette période, sa nourriture doit se limiter au lait de cette femme.[7] Boire de l'eau pour étancher la soif et prendre ou absorber un médicament donné à l'enfant à des fins curatives, si cela ne dépasse pas ce qui est habituel, ne portent pas atteinte à cette règle.[8]
  • Des juristes comme cheikh al-Mufîd,[9] Salâr ad-Daylamî,[10] Ibn al-Barrâj,[11] Abû as-Salâh al-Halabî[12] et ‘Allâma al-Hillî[13] fixèrent le nombre de tétées à 10, et des juristes comme cheikh at-Tûsî,[14] Muhaqqiq al-Hillî[15] et ash-Shahîd al-Awwal[16] le fixèrent à 15.
  • La période et le nombre de tétées doivent être consécutifs et provenir d'une seule femme, sans qu'entretemps l'enfant ne prenne le lait d'une autre femme ou autre nourriture.[17]
  • L'enfant doit téter le lait au sein de la femme, et non d'une autre manière.[18]
  • L'âge de l'enfant doit être inférieur à deux années lunaires (354 ou 355 jours).[19] Si une partie des tétées a lieu après l'âge de deux ans, le fait de devenir Maharam ne se réalise pas.[20]
  • L'enfant doit téter à chaque fois au sein de la femme vivante.[21]

Il est mentionné dans le livre « Tafsîr Nimûni », la philosophie de devenir Mahram par l'allaitement est la similarité que les enfants de lait acquièrent avec les enfants de lignage du fait d'être nourris de la chair et des os par le lait de la nourrice, et chacun est considéré comme une partie de son corps.[22]

Mahrams de lait

Les juristes, en se basant sur un hadith du Prophète (s) : « est interdit par la parenté de lait ce qui est interdit par la consanguinité »,[23] déclarèrent interdit par allaitement le mariage avec toutes les femmes avec qui le mariage est interdit par le lignage.[24]
Si les conditions de devenir Mahram par l'allaitement sont remplies, les personnes suivantes deviennent Mahram les unes par rapport aux autres :

  • Si le nourrisson est une fille, elle devient Mahram avec le mari de la femme qui l'a allaitée (le père de lait) ainsi qu’avec le père, le frère, l'oncle paternel, l'oncle maternel, le fils et les petits-fils du mari de cette femme. De même, le père, le grand-père, le frère, le fils, le petit-fils, l'oncle maternel et l'oncle paternel de la femme deviennent Mahram avec cette fille.[25]
  • Si le nourrisson est un garçon, il devient Mahram avec la femme qui l'a allaité (la mère de lait), ainsi qu’avec la mère, la grand-mère, la sœur, la fille, la petite-fille et la tante maternelle et la tante paternelle de celle-ci.[26]

Les personnes mentionnées ne deviennent Mahram qu’avec l'enfant qui a été allaité, et non avec ses proches parents.[27]

Allaitement de l'adulte

Allaitement de l'adulte est un terme qui est mentionné dans les textes de hadiths et de fiqh sunnites[28] signifiant l'allaitement d'un adulte ou d'un homme au sein d'une femme non-Mahram.[29]

Certains juristes sunnites, en se basant sur un hadith d'Aïcha selon lequel le Prophète (s) aurait permis à une femme d'allaiter un homme adulte non-Mahram pour établir un lien de Mahram avec lui,[30] considérèrent l'allaitement d'un homme adulte non-Mahram d’une femme allaitante comme une cause de edvenir Mahram et de parenté.[31]

Il existe une divergence d'opinions entre les savants sunnites sur le fait que l'allaitement après l'âge de deux ans de l'enfant entraîne le fait de devenir Mahram ou non.[32] La plupart des juristes sunnites comme Mâlik, Abû Hanîfa et as-Shâfi‘î ne considérèrent pas l'allaitement après l'âge de deux ans comme une cause de devenir Mahram et le déclarèrent illicite.[33]

Les juristes chiites s'accordent pour dire que l'allaitement de l'adulte ne crée pas de lien de parenté et du fait de devenir Mahram et qu'un tel acte est illicite.[34]

Banque de lait

La banque de lait maternel est une unité pour la consommation des nouveau-nés malades et prématurés privés de lait maternel. L'idée de créer une banque de lait fut proposée en 1909 par l'Organisation mondiale de la santé et un an plus tard, le premier centre de banque de lait maternel fut construit aux États-Unis.[35] Le premier centre de banque de lait de France fut également créé en 1947 à Paris.[36]

Selon les juristes chiites, l'utilisation des laits provenant des banques de lait ne réalise pas du fait de devenir Mahram.[37] d’après eux, seul l'allaitement direct au sein entraîne ce lien.[38]
Cependant, certains juristes sunnites considèrent l'utilisation par les nouveau-nés des laits de banque comme conduisant à un mélange des lignées et des origines et comme un acte non islamique.[39] C'est parce que des juristes comme Mâlik b. Anas considérèrent que l'allaitement de l'enfant, que ce soit directement au sein ou par tout autre moyen versé dans sa gorge, entraîne le fait de devenir Mahram.[40]

Références

  1. Ayatollah Muhammad Hasan an-Najafî, Jawâhir al-Kalâm, vol 29, p 264 - 309
  2. Ayatollah Muhammad Hasan an-Najafî, Jawâhir al-Kalâm, vol 29, p 264
  3. Cheikh at-Tûsî, Al-Khilâf, vol 5, p 93
  4. Ayatollah Muhammad Hasan an-Najafî, Jawâhir al-Kalâm, vol 29, p 264 ; Cheikh al-Hurr al-‘ milî, Wasâ'il ash-Shî'a, vol 20, p 280
  5. Ayatollah Muhammad Hasan an-Najafî, Jawâhir al-Kalâm, vol 29, p 264
  6. Ayatollah Muhammad Hasan an-Najafî, Jawâhir al-Kalâm, vol 29, p 271
  7. Cheikh at-Tûsî, Al-Khilâf, vol 5, p 95
  8. Imâm Khumaynî, Tahrîr al-Wasîla, vol 2, p 271
  9. Cheikh al-Mufîd, Al-Muqni‘a, p 502
  10. Ad-Daylamî, Al-Marâsim al-‘Alawîyya, p 149
  11. Ibn al-Barrâj, al-Muhadhdhab, vol 2, p 190
  12. Al-Halabî, Al-Kâfî fi al-Fiqh, p 285
  13. ‘Allâma al-Hillî, Mukhtalaf ash-Shî‘a, vol 2, p 70
  14. Cheikh at-Tûsî, Al-Khilâf, vol 5, p 95
  15. Al-Muhaqqiq al-Hillî , Sharâyi’ al-Islâm fî Masâ’il al-Halâl wa al-Harâm, vol 2, p 227
  16. Ash-Shahîd al-Awwal, Al-Lum‘at ad-Dimashqîyya, p 163
  17. Al-Muhaqqiq al-Hillî , Sharâyi’ al-Islâm fî Masâ’il al-Halâl wa al-Harâm, vol 2, p 228
  18. Al-Muhaqqiq al-Hillî , Sharâyi’ al-Islâm fî Masâ’il al-Halâl wa al-Harâm, vol 2, p 228
  19. Al-Muhaqqiq al-Hillî , Sharâyi’ al-Islâm fî Masâ’il al-Halâl wa al-Harâm, vol 2, p 228
  20. Cheikh at-Tûsî, Al-Mabsût, vol 5, p 293
  21. Al-Muhaqqiq al-Hillî , Sharâyi’ al-Islâm fî Masâ’il al-Halâl wa al-Harâm, vol 2, p 227
  22. Ayatollah Makârim Shîrâzî, Tafsîr Nimûni, vol 3, p 329
  23. Al-Maghribî, Da‘â’im al-Islâm, vol 2, p 240
  24. Fâdil al-Miqdâd, Kanz al-‘Irfân fî Fiqh al-Qur’ân, vol 2, p 182 ; Muqaddas Ardibîlî, Zubdat al-Bayân, p 524
  25. Al-Muhaqqiq al-Hillî , Sharâyi’ al-Islâm fî Masâ’il al-Halâl wa al-Harâm, vol 2, p 228 - 229 ; Imâm Khumaynî, Tahrîr al-Wasîla, vol 2, p 288
  26. Al-Muhaqqiq al-Hillî , Sharâyi’ al-Islâm fî Masâ’il al-Halâl wa al-Harâm, vol 2, p 229 ; Imâm Khumaynî, Tahrîr al-Wasîla, vol 2, p 288
  27. Fallâh Zâdih, mûzish Fiqh, p 360
  28. Muslim ibn al-Hajjâj, Sahîh Muslim, vol 2, p 1076
  29. Muslim ibn al-Hajjâj, Sahîh Muslim, vol 2, p 1076
  30. Ibn Hanbal, Musnad Ahmad ibn Hanbal, vol 40, p 130
  31. Ibn Hazm, Al-Muhallâ bi al- thâr, vol 10, p 205
  32. Ibn Rushd, Bidâyat al-Mujtahid, vol 2, p 130
  33. Ibn Rushd, Bidâyat al-Mujtahid, vol 2, p 130
  34. Ayatollah Muhammad Hasan an-Najafî, Jawâhir al-Kalâm, vol 29, p 282 ; Cheikh at-Tûsî, Al-Mabsût, vol 5, p 293 ; Ayatollah Subhânî, Nizâm an-Nikâh fî ash-Sharî‘at al-Islâmîyya al-Gharrâ’, vol 1, p 289
  35. Murtâdî, « Pazhûhishî dar Târîkhtchi wa Darûrat Ta’sîs Bânk Shîr Mâdarân wa Tchâlishhâyi Fiqhî - Huqûqî Pîshi Rûyi ân », p 58
  36. Le Lactarium régional d'Ile-de-France
  37. Fallâh Taftî, « Barrisî Tatbîqî Hukm Ta’sîs Bânk Shîr dar Madhâhib Islâmî », p 119
  38. Ayatollah Muhammad Hasan an-Najafî, Jawâhir al-Kalâm, vol 29, p 294 ; Cheikh al-Hurr al-‘ milî, Wasâ'il ash-Shî'a, vol 20, p 386
  39. Fallâh Taftî, « Barrisî Tatbîqî Hukm Ta’sîs Bânk Shîr dar Madhâhib Islâmî », p 115 - 116
  40. Ibn Qudâma, Sharh al-Kabîr, vol 9, p 202