Tabarruk
At-Tabarruk (en arabe : التَّبَرُّك) ou la recherche de bénédiction, est un acte religieux pour obtenir la bénédiction de la part d’Allah ou de la part de tous ceux qui ont un statut exclusif auprès de Lui. Donc, on peut gagner la bénédiction de la part de certains hommes saints, comme les prophètes et les Imams, mais aussi par de certaines choses et objets comme la Ka'ba, le Coran et tous ceux qui appartiennent aux élus d’Allah.
L’authenticité d'at-Tabarruk est admise par toutes les écoles islamiques sauf le wahhabites. Les versets Coraniques, la sunna du Prophète (s) et les hadiths rapportés par les Ahl al-Bayt (a) l’autorisent tous.
Lexicographie
Le terme at-Tabarruk est dérivé de la racine « B R K » qui signifie l’abondance. Ce terme peut alors signifier : obtenir la bénédiction ou considérer quelque chose comme béni.[1]
Terminologie
Dans le vocabulaire religieux, at-Tabarruk signifie le fait de demander la bénédiction à Allah ou à une chose qui occupe un privilège auprès de Lui. Cette bénédiction peut appartenir à ce bas-monde comme le fait de demander à Allah d’augmenter ses biens, et à l’au-delà comme le fait de demander de renforcer sa foi. En demandant la bénédiction, Allah donne à une personne ou à une chose, un effet positif et sacré par lequel elle peut nous faire du bien. [2]
Relation entre at-Tabarruk et at-Tawassul
Ces deux concepts sont proches. D’après certains savants, at-Tabarruk est considéré comme une forme d'at-Tawassul. Car at-Tawassul signifie le fait de se servir d’un moyen pour atteindre un objectif. Donc, at-Tabarruk qui concerne la demande de bénédiction à Allah, fait partie du concept d'at-Tawassul.[3]
Créatures et endroits bénis dans le Coran et le hadith
Certaines créatures et certains endroits sont considérés comme bénis, auprès desquels on peut chercher at-Tabarruk. Ils sont les suivants :
Créatures:
- Le Prophète Noé (a)[4]
- Les Prophètes Abraham (a) et Isaac (a)[5]
- Le Prophète Moïse (a)[6]
- Le Prophète Jésus (a)[7]
- La famille du prophète Abraham (a)[8]
- Le Coran[9]
- Les anges[10]
- La pluie[11]
- L'olivier[12]
Endroits:
Preuves
Dans le Coran
Il n’y a pas de verset Coranique qui interdit at-Tabarruk. En revanche il y a plusieurs versets qui l'autorisent.
- Le Prophète Jacob (a) recouvra la vue en mettant la tunique de son fils Joseph (a), sur ses yeux.[18]
- Le Prophète Moïse (a) avait un cercueil dans lequel il laissa certaines choses qui appartenaient aux prophètes précédents et ce qui lui appartenait comme les rouleaux de textes sacrés qui lui avaient été révélés. Après lui, Banû Israël obtenait la bénédiction par ce cercueil.[19]
- Maqâm Ibrahim : la pierre sur laquelle le Prophète Abraham (a) montait pour construire la Ka'ba, a gagné une sacralité auprès ses adeptes et d’après le Coran, les musulmans doivent faire la prière à côté de cette prière. Ceci ne peut être obligatoire que pour demander la bénédiction.[20]
Dans la sunna du Prophète (s)
Il y a plusieurs narrations qui prouvent que le Prophète (s) conseillait les musulmans de faire at-Tabarruk :
- Le Prophète (s) ordonna à ses compagnons d’obtenir la bénédiction du puits de chameau du prophète Salih (a).[21] Ceci prouve qu’on peut demander la bénédiction aux choses qui appartiennent aux prophètes, même après leur décès.
- La veille du mariage de Fatima az-Zahrâ (a), le Prophète (s) jeta le reste de l’eau de ses ablutions sur le corps de sa fille et demanda à Allah de la bénir ainsi que sa descendance.[22]
- L’Imam Ali (a) dit :
- «Le Prophète (s) a guéri mes yeux en les touchant avec ses mains et désormais, je n’ai plus mal aux yeux.»[23]
- Un jour, le Prophète (s) jeta l’eau de ses ablutions sur le corps d’un malade et il a guéri.[24]
- Après avoir fait le pèlerinage, le Prophète (s) se rasa la tête et ses compagnons prenaient de ses cheveux pour obtenir une bénédiction.[25]
- Pendant le voyage nocturne (Al-Mi’râj), le Prophète (s) fit la prière dans certains endroits qui appartenaient aux prophètes.[26] Cela ne fut que pour obtenir la bénédiction de ces endroits bénis grâce aux prophètes.
- Lors de l’enterrement de Fatima bint Asad, la mère de l’Imam Ali (a), le Prophète (s) lui fit porter son vêtement[27] et se coucha pendant quelque moment dans sa tombe, pour qu’elle ne souffre pas après l’enterrement.[28]
- Abd Allah b. Ubay demanda au Prophète (s) de lui donner un de ses vêtements pour qu’il soit enterré avec le vêtement béni du Prophète (s).[29]
- Il est également rapporté que les compagnons du Prophète (s) prenaient tout le reste de l’eau de ses ablutions comme une bénédiction et il n’en versait même pas une goutte sur la terre. Si c’était interdit d’en prendre comme la bénédiction, le Prophète (s) ne l’aurait jamais autorisé. Au contraire, il conseillait à ses compagnons de le faire.
Dans la vie des Ahl al-Bayt (a)
Il y a plusieurs récits dans la vie des Ahl al-Bayt (a) qui prouvent qu’ils pratiquent at-Tabarruk. Vous en voyez quelques-uns ci-dessous :
- Fatima az-Zahra (a) allait sur la tombe du Prophète (s) et prenait de sa poussière comme une bénédiction.[30]
- Il y a des narrations qui rapportent que l’Imam al-Husayn (a)[31], l’Imam as-Sâdiq (a)[32], l’Imam ar-Ridâ (a)[33] et l’Imam al-Jawâd (a)[34] obtenaient la bénédiction de la tombe du Prophète (s).
- L’Imam al-Hasan al-Mujtabâ (a) écrivit dans son testament que si c’est possible, enterrez-moi à côté de la tombe du Prophète (s).[35]
- L’Imam as-Sâdiq (a) obtint la bénédiction du bâton du Prophète (s).[36]
Opinion des écoles islamiques
Chiites
D’après la jurisprudence chiite, le fait de demander la bénédiction d’une sainte personne ou d’une chose sacrée est licite et conseillé.[37] Par exemple, écrire les noms des Imams (a) sur le linceul[38], appeler les enfants aux noms des Imams (a)[39], obtenir la bénédiction de leurs tombes, mettre la poussière de leurs mausolées dans la tombe[40], demander la bénédiction des versets coraniques en les écrivant sur le linceul sont tous conseillés et sont considérés comme at-Tabarruk.[41]
Quatre écoles juridiques sunnites
Parmi les savants sunnites, certains croient qu’il est conseillé de faire at-Tabarruk et d’autres croient qu’il est déconseillé.
Ahmad b. Hanbal a autorisé le fait d’obtenir la bénédiction de la chaire (Minbar) du Prophète (s), de sa tombe et le fait de les embrasser. [42]
Shahâb al-Dîn Khafâjî a déconseillé le fait de toucher, embrasser et coller le corps sur la tombe du Prophète (s).[43]
Certains jurisconsultes Shâfi’îtes, comme Ramlî Al-Shâfi’î et Muhib Al-Dîn Al-Tabarî ont autorisé qu’on touche la tombe du Prophète (s) ou celles des savants. [44]
Parmi les Mâlikites aussi il y a des savants qui l’autorisent ; comme Zarqânî al-Mâlikî.[45]
Wahhabites
D’après les wahhabites, at-Tabarruk est licite juste par le Prophète (s) et ce qui lui appartient (tout ce qui était en contact avec son corps). Certains wahhabites croient que ceci était autorisé juste lorsque le Prophète (s) fut en vie.[46]
Preuves des wahhabites
- At-Tabarruk d’une personne autre que le Prophète (s) est considéré comme un acte polythéiste et il n’y a aucune preuve dans la sunna qui l’autorise.[47]
- At-Tabarruk est une innovation, et le Prophète (s) et ses compagnons ne faisaient pas.[48]
- At-Tabarruk des compagnons par le Prophète (s) était seulement pendant le temps où il fut en vie ; car le Prophète (s) était en relation avec Allah. Mais après son décès il n’y a plus de telle relation entre son corps et Allah. Donc, il n’est pas autorisé de faire At-Tabarruk après son décès. [49]
- Les compagnons du Prophète (s) et leurs suivants évitaient de faire at-Tabarruk d’une personne ou une chose d'autre que le Prophète (s).[50]
Analyse de cette opinion
- At-Tabarruk ne se fait pas en ayant l’intention que cette personne ou cette chose est indépendante et qu’elles peuvent intervenir sans la volonté divine. Donc, cette pratique n’est pas considérée comme une pratique polythéiste.
- D’après certaines narrations rapportées par Sahîh Bukhârî, les compagnons faisaient at-Tabarruk même après le décès du Prophète (s).[51]
- On ne peut pas considérer cette pratique comme une innovation dans la religion, car à l’époque du Prophète (s) et après lui, beaucoup de gens le faisaient. De plus, certains savants sunnites comme Shâfi’î n’interdisaient pas toutes les innovations. Ils distinguaient entre la mauvaise innovation et la bonne innovation. Ils considéraient at-Tabarruk comme une bonne innovation et l’autorisaient.[52]
- D’après les règles juridiques, toute action est licite sauf s’il y a une preuve qui l’interdit. Donc, on ne peut pas dire que at-Tabarruk est interdit, car il n’y a aucune preuve qui va dans ce sens.
Tabarruk dans la communauté musulmane
À l’époque du Prophète (s) et après son décès, on obtenait la bénédiction de son corps ainsi que des choses et des endroits qui lui appartenaient.[53]
Tabarruk par le corps du Prophète (s)
D’après les récits, les compagnons du Prophète (s) gardaient même les cheveux du Prophète (s) pour en obtenir la bénédiction.[54]
Au cours du traité de paix de Hudaybîyya, lorsque le Prophète (s) coupa ses cheveux, les compagnons étaient autour de lui et les prenaient dans le but d’en obtenir une bénédiction.[55]
Khalid b. al-Walîd avait un bandeau sur lequel, il y avait quelques cheveux du Prophète (s). Il le portait pendant les batailles pour en avoir de la bénédiction divine.[56]
Il est rapporté qu’Anas b. Mâlik[57] et Umm Salîm obtenaient la bénédiction par la sueur du Prophète (s).
Ils profitaient également du reste de l’eau que le Prophète (s) buvait[58], de son récipient[59] et du reste de l’eau de ses ablutions.[60]
Les noms de 20 sources et puits bénis par le Prophète (s) dont les compagnons profitaient pour gagner la bénédiction divine, sont également mentionnés.[61]
Tabarruk par les objets personnels du Prophète (s)
On obtenait la bénédiction du bâton[62], du vêtement[63], du turban[64], des chaussures[65], de l’épée[66], du drapeau[67] et du lit du Prophète (s)[68], ainsi que du tapis sur lequel le Prophète (s) priait.
Tabarruk par des endroits attribués au Prophète (s)
Les musulmans de l’époque du Prophète (s) faisaient beaucoup d’attention aux endroits qui appartenaient au Prophète (s), ainsi qu'aux endroits où il avait prié[69], où il s’était assis[70] et même, où il avait passé.[71]
Faqîhî, un écrivain du troisième siècle de l’hégire, a écrit les noms de tous les endroits dans lesquels le Prophète (s) était entré, dans un livre qui s’appelle :
- « Al-Mawâdi’ Al-Latî Dakhalahâ Rasûl Allah ».[72]
Le fils de Umar, Abd Allah faisait beaucoup d’attention aux endroits qui appartenaient au Prophète (s).[73] En se basant sur ce qu’il faisait, certains savants sunnites ont considéré cet acte comme Mustahab (conseillé).
Vous lisez ci-dessous les noms de certains de ces endroits à La Mecque et à Médine :
A La Mecque :
- L’endroit où le Prophète (s) est né.[74]
- L’endroit où, après avoir accompli le pèlerinage, le Prophète (s) sacrifia un chameau.[75]
- L’endroit où les compagnons ont prêté le serment d’allégeance (Bay’at Ar-Ridwân) au Prophète (s).[76]
- La grotte qui a abrité le Prophète (s) au début son émigration.[77]
- La mosquée dans laquelle, après la conquête de La Mecque, les mécréants prêtèrent le serment d’allégeance au Prophète (s) (Masjid Al-Ghanam).[78]
- L’endroit où le Prophète (s) fit un discours au cours de son dernier pèlerinage, la mosquée de Khayf.[79]
- La maison de Khadidja (a) qui fut l’endroit de la naissance de Fatima az-Zahra (a).[80]
- La maison de ‘Arqam b. Abî Arqam où les musulmans se cachaient pendant les premières années de l'avénement de l’islam à La Mecque.[81]
- La mosquée d’Al-Ghadîr où le Prophète (s) fit le sermon d’Al-Ghadîr.[82]
- Qubbat al-Wahy, une pierre qui, par la grâce de Dieu, salua miraculeusement le Prophète (s).[83]
- Une pierre sur la route de Médine, sur laquelle le Prophète (s) se reposa lors de son retour à Médine.[84]
A Médine :
- Le Minbar (la chaire) du Prophète (s)[85]
- La distance entre la chaire du Prophète (s) et sa maison qui est, d’après les hadiths, un des jardins paradisiaques.[86]
- La poussière d’autour de la tombe du Prophète (s) dont les musulmans prenaient pour la bénédiction.[87]
- La grotte de Hirâ’ et Thawr[88]
- La mosquée de Shajara où le Prophète (s) faisait Al-Îhrâm (la consécration qui consiste à s’abstenir de certaines choses licites pendant le pèlerinage).[89]
- Masjid al-‘Ijâba, une mosquée dans laquelle le Prophète (s) fit une prière.[90]
- Masjid Qubâ, la première mosquée construite par le Prophète (s).[91]
Tabarruk par des objets sacrés
A part le Prophète (s) et les endroits cités ci-dessus, les musulmans demandaient la bénédiction à travers certaines choses sacrées comme :
- Le Coran[92]
- La pierre noire (Hajar Al-Aswad)[93]
- Le drapeau de l’Imam al-Hasan al-Mujtabâ (a) et de l’Imam al-Husayn (a)[94]
- L’épée de Ja’far At-Tayyâr[95]
- Le Coran, écrit par la main de l’Imam Ali (a), Mushaf de l'Imam Ali (a)[96]
- Le rideau de la Ka'ba[97]
- L’eau de l’Euphrate [98]
- L’eau de ZamZam (la source de Zam-Zam)[99]
- La maison de Fatima az-Zahrâ (a)[100]
- La mosquée de Koufa[101]
Tabarruk par les tombes des Imams
Durant chaque année, tous les chiites et beaucoup de sunnites visitent les tombes de onze Imams et les endroits qui appartiennent aux douze Imams et en demandent la bénédiction divine.
Tabarruk par les tombes des vertueux
Pendant des siècles, les musulmans obtenaient la bénédiction non seulement de la tombe du Prophète (s), mais aussi, des tombes des compagnons, celles de leurs adeptes et celles des gens vertueux.[102]
D’après Al-Subkî, un savant shâfi’îte, il est autorisé d’obtenir la bénédiction même de la tombe d’une personne croyante. Il a également dit :
- « Nos savants pratiquaient toujours at-Tabarruk et demandaient la bénédiction des tombes des prophètes et de celles des vertueux ».[103]
Voire aussi
Références
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- ↑ At-Tabarruk Anwâ'uhû wa Ahkâmuhû, p 43
- ↑ Al-Mawsû'a al-Kuwaytîyya, vol 10, p 69
- ↑ Sourate Hûd, v 48
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- ↑ Sourate an-Naml, v 8
- ↑ Sourate Maryam, v 31
- ↑ Sourate Hûd, v 73
- ↑ Sourate An'âm, v 155
- ↑ Sourate n-Naml, v 8
- ↑ Sourate al-Qâf, v 9
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