Haram (lieu saint)

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Tableau en tapis, représentant les sept villes d'amour, haft shahs-e eshgh; préservé dans le musée du sanctuaire de l'Imam ar-Ridâ à Mechhed. Dans ce tableau sept lieux saints chiites sont illustrés à savoir :Masjid al-harâm à La Mecque, Masjid an-Nabbî à Médine, le sanctuaire de l'Imam Ali à Nadjaf, le sanctuaire de l'Imam al-Husayn à Karbala, le sanctuaire de l'Imam ar-Ridâ à Mechhed, le sanctuaire de Kadhimayn et le sanctuaire de Askarîyyayn

Haram (en arabe: الحَرَم), terme qu'on peut traduire en français : lieu saint ou sanctuaire, désigne en Islam d'abord l'ensemble des lieux entourant un lieu sacré. La particularité de ces lieux est qu'on leur accorde une valeur symbolique singulière, et que, de ce fait, on ne les traite pas de même façon que les autres lieux. Ainsi, les actes et les comportements exigés dans ces lieux sont différents des autres ; parfois l’entrée dans ces lieux est également ritualisée.

Le Haram le plus important pour tous les musulmans en général, est d'abord le haram de La Mecque, où se trouve la Maison de Dieu (la Ka'ba); en deuxième lieu, se situe le Haram de la Médine, où se trouvent l'ancienne maison du Prophète (s) ainsi que sa tombe vénérée. Ces deux lieux saints constituent ensemble un territoire d'une haute sainteté, appelé dans le monde musulmans al-Haram al-charif (les deux Haram honorables).

Dans un sens plus large, le terme haram est utilisé pour les lieux entourant les tombes des imams, celles des descendants des imams, celles des sages et des mystiques. On peut entendre par exemple des expressions comme : Haram 'Alawî (pour parler du sanctuaire entourant la tombe de l'Imam Ali), haram Radawî (sancturaire entourant la tombe de l'Imam ar-Ridâ ), ou haram ‘Abd al-‘Azîm Hasanî (le sancturaire de ‘Abd al-‘Azîm Hasanî, un des descendants de l’Imam al-Hasan, situé à Rey au sud de Téhéran-Iran).

Dans le sens commun des croyances chiites imamites, Haram est un périmètre sacré contournant la tombe d’un saint ou d’une sainte, où les chiites effectuent des visites pieuses et des pèlerinages (Zîyâra).

Selon l'avis des juristes-théologiens chiites, il faut respecter des préceptes singuliers comme la demande pieuse d’entrée (jawâz) pour entrer dans les quartes Haram, à savoir le Haram Makki, le Haram Nabawî, la Mosquée de Koufa, et le Al-Hâ'ir al-Husaynî, ils insistent également sur l'importance de prière du voyageur dans ces lieux.

Sens de haram dans sa terminologie

Le terme haram de la racine h.r.m (signifiant : interdit), se réfère souvent (dans la culture arabo-musulmane) à un périmètre entourant l'espace intime et privé d'une personne, un espace qui y abrite ses êtres chers (femme et enfants) et les protègent des risques et des dangers provenants du monde extérieur ; ainsi le terme haram peut signifier la maison ou le foyer[1].

Dans les textes islamiques, ce terme est utilisé plutôt à propos d'une zone qui entoure un lieu hautement sacré (par exemple la Ka'ba) et dont l'entrée exige des rites particuliers[2]. Normalement quand on nomme haram un périmètre géographique, c'est pour lui donner un respect particulier, ce qui fait que certains actes deviennent interdits dans ce périmètre[3].

Sens de haram dans son usage

L'usage de ce terme est différents d'une source à l'autre, d'une culture musulmane à l'autre. En général il peut être utilisé pour un périmètre géographique très large, comprenant la totalité d'une ville ou même deux villes, comme est le cas de deux villes de la Mecque et de Médine; ou pour un périmètre géographique restreint, comme une mosquée ou un tombeau[4].

Ce terme est souvent utilisé comme préfixe pour nommer des lieux saints connus comme : La mosquée du Prophète située à Médine qu'on appelle en arabe : al-Haram an-Nabawî ou al-Haram ar-Rasûl ; les deux villes saintes de La Mecque et de Médine qu'on appelle al-Haramayn ach-charîfayn ; le sanctuaire de l'Imam Ali à Nadjaf qu'on appelle Haram Nadjaf ; La mosquée al-Aqsâ qu'on appelle Haram Bayt al-Muqaddas.

Sanctuaires (Bârgâh) des Imams Impeccables et de leurs descendants

Comme nous l'avons indiqué plus haut, le terme haram est souvent utilisé, dans le monde chiite, pour parler des sanctuaires (Bârgâh) des Imams Impeccables et de ceux de leurs descendants. On peut entendre par exemple : "haram" ou al-Hâ'ir al-Husaynî, à propos du sanctuaire de l'Imam al-Husayn (a) à Karbala, ou le haram Radawî à propos du sanctuaire de l'Imam ar-Ridâ (a) à Mechhed.

Les haram chiites sont normalement constitués des parties suivantes:

  1. Marqad (la tombe vénérée)'
  2. Zarih (la châsse ou le grillage qu'on pose sur la tombe)
  3. Bârgâh (la pièce où est placé le Zarih)
  4. Rawâq (le portique ou les espaces mi-couverts autour du noyau sacrée du l'espace couvert du mausolée)
  5. Sahn (La cour entourant la globalité du mausolée et qui lui définit ses périmètres)

Haram Makkî

Haram Makkî constitue l'exemple le plus important et significatif de haram. Dans la culture musulmane on appelle Hirmî celui qui a un lien avec le haram (signifiant : celui de Haram); et on appelle muhrim le pèlerin qui entre dans les périmètres sactrés du Haram Makkî.

On appelle Hilla les lieux situés à l'extérieur du périmètre du Haram.

La sacralité et le respect du Haram Makki a une ancienneté considérable. Selon un hadith rapporté du Prophète (s)[5], ce lieu a été considéré comme un lieu sacré (haram), depuis la création des cieux et de la terre. Selon un autre hadith, l'extension de la terre (dahw al-ard) a débuté à partir de ce lieu[6].

Haram Nabawî

Haram Nabawî ou Haram de Médine, est le deuxième lieu saint des musulmans. Selon les hadiths et les préceptes juridiques, le respect de certains rites est exigé dans ce lieu[7]. Dans les sources sunnites il est indiqué que le Prophète (s) se chargera de l'intercession des habitants de Médine lors de la Résurrection[8].

Il existe toutefois plusieurs avis différents à propos du pentamètre de ce lieu.

Hâ'ir al-Husaynî (Haram de l'Imam al-Husayn)

Haram de l'Imam al-Husayn (a) est très vénéré chez les chiites. Il existe des avis très différents à propos du périmètre de ce haram chez les savants chiites. Certains considèrent que les périmètres entourants les lieux d'enterrement de l'Imam et de ses compagnons, sauf Abbas (a)[9], d'autres considèrent toute la ville de Karbala[10] et le jardin (rawzah) sacré de l'Imam al-Husayn (a) comme les limites de ce périmètre sacré[11].

Egalement dans un hadith rapporté de l'Imam Ali (a), la ville de Koufa est considéré comme son sanctuaire[12].

Préceptes juridiques concernant les haram specifiques (Haramayn, la Mosquée de Koufa et Hâ’ir al-Husaynî)

La demande de l'autorisation d'entrée (jawâz) et le fait d'effectuer une prière entière pour le voyageur - même si la prière dite "cassée" (qasr) lui est aussi autorisée - font partie des préceptes juridique concernant les quarte haram en question[13].

Les sources de ces préceptes, prononcés par les jurisconsultes, sont des hadiths[14].

Des termes comme "Haramyn Sharifayn", "Makkeh et Madinah" et "Masjidayn", sont utilisé dans ces hadiths. Selon cela, certains jurisconsultes considèrent ces préceptes comme légitime uniquement à l'intérieur de La mosquée al-Harâm et de La mosquée an-Nabî, et non pas dans la totalité de périmètre des Haram Makkî et Nabawî.

Ibn Babuyah [15] a insisté sur l'obligation de la prière cassée (qasr) dans ces lieux, et pense que ces lieux ne devraient pas avoir d'effet sur la prière quotidienne obligatoire. Il parait que cet avis est basé sur l'argumentation générale et les hadiths qui exigent une prière cassée (qsr) pour le voyageur. Toutefois les autres jurisconsultes ont interprété ces hadiths par le principe de dissimulation pieuse (Taqiya) et n'ont pas accepté cet avis[16], ils ont insisté sur limportance de la "prudence"[17].

Certains jurisconsultes avant-coureurs comme Ibn Junayd Iskâfî[18] et 'Alam al-Hudâ[19] considèrent comme obligatoire d'effectuer une prière entière pour le voyageur dans ces quatre lieux saints mais aussi même dans les sanctuaires des autres Imams chiites[20]. Ibn Idrîs Hillî pense que cet avis est valide, outre des deux haram Makkî et Nabawî, seulement dans le sanctuaire de l'Imam al-Husayn (a). D'autres ont posé la question de si ce précepte est valide uniquement à l'intérieur des haram de la Mosquée de Koufa et du sanctuaire de l'Imam al-Husayn, ou il comprend aussi la totalités des lieux situés dans les deux villes de Karbala et Nadjaf[21]. Les hanafites qui, comme les chiites, considèrent la prière du voyageur devrait être cassée qasr en général, pensent que dans le Haram de La Mecque, le voyageur devrait faire une prière entière[22].

Préceptes juridiques concernant les haram en général

Il existe d'autres préceptes généraux concernants ces haram qu'on applique aussi à tous les sanctuaires des Imams chiites. Ils sont les suivants:

  1. Le pèlerin doit être dans l'état de pureté rituel pour pouvoir y entrer [23]
  2. Il est interdit de rendre impur les lieux du haram, et au cas où cela arrive, il est obligatoire de l'enlever l'impureté et rendre le lieu pur [24]
  3. Il est conseillé que le pèlerin effectue une absolution entière (Ghusl) avant d'entrer dans le haram [25]
  4. Il est conseillé d'enterrer les morts dans ces lieux et non pas ailleurs [26]
  5. Il est interdit d'effectuer des exécutions juridiques punitives dans ces lieux [27]

Voir aussi

Références

  1. Ibn Athîr, al-Nihâya (chapitre: d'ams); Ibn Mandhûr, Lisân al-'arab;Jabaratî, Târikh 'ajâ'ib al-âthâr, vol.2, p. 143
  2. Juhârî, al-Sahâh; Murtadâ Zubaydî, Tâj al-'arts
  3. Kurdî, al-Târikh al-taqwîm, vol. 1, chapitre 1, p. 101; Burûjerdî, Mustanad al-'urvat al-wuthqâ, vol.8, p.423
  4. Muhâjî Isyûtî, Jawâhîr al-'uqûd, vol. 2, p. 474; Bahrânî, al-Hadâ'iq al-nâzira, vol.7, p. 317-318, vol. 11, p. 455; Baghdâdî, Hidiya al-'arifîn, vol. 2, p. 541
  5. Farâhîdî, Kitât al-'Ayn; Ibn athî, al-Nihâya; Ibn Mandhûr, Lisân al-'Arab : rechercher sous le terme : haram
  6. Fâkahî, Akhbâr Makkeh, vol.2, p. 270; Saduq, Man lâ yahduruhu al-Faqih, vol. 2, p. 241; Hurr 'Âmilî, vol. 13, p. 241-242
  7. Ibn Idris Hilli, As-Sarâ'ir, vol.1, p. 651-652; Zarkashî, 1410, p. 243-245; Golpaygânî, p. 187 et p. 210; Zahilî, vol. 3, p. 335-336
  8. Ibn Hanbal, Musnad Ahmad, vol.6, p.370; Muslim b. Hajjaj, vol.4, p. 113
  9. Shaykh Mufid, p. 126; Ibn Idris Hilli, al-Sarâ'ir, vol.1, p.342
  10. Ibn Sa'ïd, al-Jâmi' Lil-Sharâi'i, p.93
  11. Bahrânî, vol.11, p.463; Narâqî, vol.8, p.316; Hakîm, Mustamsik al-'urwa, vol.8, p. 188
  12. Kulaynî, vol.4, p. 563
  13. Tûsî, al-Nihâya fî mujarrad al-fiqh wa al-fatâwî, p. 124; Allamah Hillî, Mukhtalif al-shi'a fî ahkâm al-shari'a , vol.1, p. 333; Shahîd Thânî, vol.1, p. 787-788
  14. Tûsî, al-Nihâya fî mujarrad al-fiqh wa al-fatâwî, p. 124; Allamah Hillî, Mukhtalif al-shi'a fî ahkâm al-shari'a , vol.1, p. 333; Shahîd Thânî, vol.1, p. 787-788
  15. Ibn Babuyah, al-Muqna' , p. 262
  16. Muqqadas Ardibîlî, Majma' al-fawâ'id wa al-Burhân, vol.3, p. 424-425; Bahrânî, vol.1, p. 440-442
  17. Mirzâ Qommi, vol.1, p. 73
  18. Ibn Junayd, Les Fatâwî,vol. 89-90
  19. 'Alam al-Hudâ, Rasâ'il al-sharîf almurtadâ, vol.3, p. 47
  20. Bahrânî, vol.11, p. 438 et 465; Burûjerdî, vol.8, p. 420-421
  21. Burûjerdî, vol.8, p. 414 et420
  22. Kasânî, Bidâ' al-Sanâ'i, vol.1, p. 91-92; Ibn Qudâma al-Mughanî, vol.2, p.107
  23. Mûsawî 'Âmilî, vol.1, p. 282
  24. Tabâtabâ'î Yazdî, vol.1, p.89-90
  25. Tabâtabâ'î Yazdî, vol.1, p.447; Mûsawî 'Âmilî, vol.2, p.152
  26. Tabâtabâ'î Yazdî, vol.1, p.447; Mûsawî 'Âmilî, vol.2, p.152
  27. Ibn Idrîs Hillî, al-Sarâ'ir, vol.3, p. 263-264; Khu'î, vol.2, p.184-185