Insurrection irakienne de 1991

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Démolition du mur du sanctuaire de l'Imam al-Husayn (a) à Karbala

Insurrection irakienne de 1991 ou al-Intifâda ash-Sha'bânîyya (en arabe : الانتفاضة الشعبانية) en Irak était une révolte du peuple irakien contre le régime de Saddam Hussein, survenue au mois de Sha'bân de l'année 1411 de l'Hégire lunaire (correspondant à l'année 1369 de l'ère solaire). La révolte a commencé à Bassorah, et en l'espace de 15 jours, les manifestants ont conquis quatorze des dix-huit provinces d'Irak.

En réponse, le Parti Ba'ath d'Irak a réagi en tuant des dizaines de milliers de personnes et le déplacement d’environ deux millions de personnes. Plusieurs religieux ont été arrêtés ou exécutés, et beaucoup ont fui le pays. De plus, en réaction aux révoltes, le sanctuaire de l'Imam Ali (a) et celui de l'Imam al-Husayn (a) ont été endommagés, et le gouvernement irakien a détruit de nombreuses écoles religieuses, mosquées et maisons de commémoration (Husaynîyya).

Le mécontentement populaire, la destruction et les dommages causés aux infrastructures économiques et sociales de l'Irak pendant les guerres avec le Koweït et l'Iran ont été des facteurs ayant conduit à la révolte du peuple irakien contre Saddam Hussein.

Contexte et Origine

La révolte du peuple irakien au mois de Sha'bân en l'an 1411 de l'Hégire luniare (mars 1991) a commencé dans la ville de Bassorah. Un militaire irakien, de retour de la guerre du Koweït, a tiré sur une photo de Saddam Hussein avec un obus de char. Après cet incident, les manifestants ont attaqué le bâtiment du Parti Ba'ath d'Irak, puis la prison de la ville et l'ont prise d'assaut. Peu de temps après, ils ont conquis la ville de Bassorah, et dès la diffusion de la nouvelle de sa prise, d'autres provinces d'Irak ont également été prises par les insurgés.

La destruction des infrastructures économiques et sociales de l'Irak après la guerre du Koweït, les dommages causés par la guerre avec l'Iran, et le mécontentement général à l'égard du régime Ba'ath ont été identifiés comme des causes de la révolte du peuple irakien contre Saddam Hussein. À la suite de l'invasion du Koweït par l'Irak, les forces alliées sous la direction des États-Unis ont attaqué l'Irak, détruisant de nombreuses infrastructures économiques et sociales du pays. Après la guerre du Golfe Persique, le gouvernement irakien a été gravement affaibli et les institutions gouvernementales ont été anéanties. Le peuple irakien a également eu accès à des armes, ce qui a contribué à l'émergence de la révolution.

Cette révolte a commencé de manière spontanée, sans planification préalable, et aucun parti politique ni personne en particulier n'a pris la direction absolue du mouvement.

Étendue

Lors d'al-Intifâda de Sha'ban, quatorze des dix-huit provinces d'Irak ont été prises par les rebelles. Les manifestants ont pris le contrôle des provinces de Diyala, Wasit, Maysan, Bassorah, Dhi Qar, Muthanna, Qadisiyyah, Babil, Karbala, Nadjaf, Dohuk, Erbil, Kirkouk et Souleymanieh, tandis que seules les provinces centrales, à savoir Salah ad-Din, Bagdad, Niniveh et Al-Anbar, sont restées sous le contrôle du gouvernement. En conséquence, al-Intifâda de Sha'bân est considérée comme le plus grand défi interne pour l'Irak pendant la période de Saddam Hussein. [7]

Nadjaf

Les mouvements populaires à Nadjaf ont commencé le 16 Sha'bân sous forme de manifestations autour du sanctuaire de l'Imam Ali (a).[9] Peu après, ces manifestations se sont transformées en affrontements armés entre les groupes populaires et les forces Ba'athistes, entraînant la mort et des blessures dans les deux camps. Les combats ont duré jusqu'au 17 Sha'bân au matin, se terminant par la victoire des groupes populaires et le levée de drapeaux verts dans le centre de la ville. [10]

Karbala

Placement de panneaux près du sanctuaire de l'Imam al-Husayn (a) indiquant l'emplacement des balles de l'armée de Saddam Hussein lors d'al-Intifâda ash-Sha'bânîyya.

La révolte à Karbala a commencé le 18 Sha'bân[11], bien que des affrontements sporadiques aient eu lieu dans la ville dès le 16 Sha'bân[12]. Les mouvements populaires à Karbala ont duré trois jours, et le troisième jour, les habitants ont pris le contrôle de la ville.[13]

Résulta de la révolte

Al-Intifâda de Sha'bân a duré 15 jours[14]. Les insurgés ont été violemment réprimés par les forces de Saddam Hussein, et selon des estimations non officielles, environ 300 000 personnes ont été tuées et près de deux millions de personnes ont été déplacées[15]. Cependant, il s'agissait du premier événement majeur menaçant sérieusement le régime de Saddam Hussein, et il a presque conduit à sa chute[16].

Certaines villes, dont Nadjaf et Karbala, ont subi les plus grandes destructions[17]. Dans ces villes religieuses, le gendre de Saddam, Husayn Kâmil, était chargé de réprimer la révolte. La répression dans ces deux villes religieuses par Husayn Kâmil a été marquée par une extrême brutalité, tuant des civils[6]. Les forces baasistes ont détruit des dizaines de mosquées, d'écoles religieuses et de Husaynîyya à Karbala et Nadjaf[18]. De nombreux livres manuscrits précieux ont également été détruits[19].

Le régime a utilisé des bombes chimiques pour reprendre certaines régions[20]. Beaucoup de personnes arrêtées par le régime baasiste ont été tuées et enterrées dans des fosses communes, qui ont été découvertes après la chute de Saddam[21]. Beaucoup de personnes se sont réfugiées dans les sanctuaires des Imams (a) pour se protéger, mais les militaires du parti Baas ont attaqué les sanctuaires et tué de nombreuses personnes [21].

Après la répression de la révolte, l'ayatollah Khû'î, accompagné de certains membres de sa famille et de ses proches, a été arrêté et transféré à Bagdad[22]. Quelques jours plus tard, il a été contraint de s'entretenir avec Saddam devant les caméras de télévision[23].

Sayyid Muhammad Ridâ Mûsavî Khalkhâlî, Sayyid Ja'far Bahr al-'Ulûm et Sayyid 'Izz ad-Dîn Bahr al-'Ulûm, qui étaient des représentants de l'ayatollah Khû'î, ont été exécutés après la répression de la révolte[24]. Sayyid Muhammad Sabzivârî, Cheikh Muhammad Ridâ Shabîb Sâ'idî et Sayyid Muhammad Sâlih Kharsân ont également fui l'Irak[25].

Dégâts aux sites sacrés

Les effets des balles de l'armée baathiste lors de l'attaque contre le sanctuaire de l'Imam al-Husayn (a) pour réprimer al-Intifâda ash-Sha'bânîyya.

La répression de la révolte à Karbala était dirigée par Husayn Kâmil, le gendre de Saddam, et à Nadjaf, par Tâhâ Yâsîn Ramadan, un membre influent du Parti Baas [26]. Les forces de Saddam ont attaqué Karbala et Nadjaf avec des canons et des tanks. Lors de ces attaques, le sanctuaire de l'Imam Ali (a), celui de l'Imam al-Husayn (a) et celui de Abbas b. Ali (a) ont été endommagés. Après cela, les portes des sanctuaires sont restées fermées pendant six mois[27].

Supporters du gouvernement

La politique des États-Unis après l'expulsion de l'Irak du Koweït en 1991 visait à changer le régime irakien. Cependant, lors d'al-Intifâda de Sha'bân, George Bush a permis à Saddam d'utiliser toutes ses forces militaires contre son peuple. Ce changement de politique a été évalué comme une mesure visant à empêcher l'émergence d'un gouvernement religieux en Irak[28].

Les observateurs estiment que les États-Unis ont permis à la garde républicaine irakienne de rester intacte pendant la guerre du Golfe Persique. Milan Rai, dans son livre, a indiqué que cette décision a été prise délibérément et consciemment au plus haut niveau des responsables américains[29].

Le secrétaire d'État américain de l'époque, dans ses mémoires publiés par la suite, a affirmé qu'au niveau international et régional, la décision avait été prise de ne pas laisser Saddam tomber, car après sa chute, le pouvoir serait entre les mains des partisans de l'Iran[20]. Les experts estiment que cette décision des États-Unis a été influencée par l'Arabie Saoudite et, en fait, par l'ensemble du monde arabe, car ils craignaient une victoire des chiites si Saddam tombait[30].

Rôle des Mudjâhidînes du peuple iranien

Selon certaines sources, le groupe terroriste des Mudjâhidînes du peuple iranien a collaboré avec le gouvernement irakien pour réprimer al-Intifâda de Sha'bân. D'après des documents, ils ont joué un rôle dans la répression à Bassorah et ont enterré un grand nombre de victimes dans des fosses communes [31].

Certains anciens membres de l'organisation ont donné des explications sur cet événement et les opérations sous le nom de "Perle". Ils ont reconnu le massacre des Kurdes lors de cette al-Intifâda et le soutien de l'organisation à Saddam [32]. Plus tard, le 29 octobre 2015, un groupe se présentant comme étant composé des familles des victimes d'al-Intifâda de Sha'bân a tué 25 membres des Mudjâhidînes et en a blessé 200 dans une opération de lancement de missiles[31].

Réactions

Le 18 Sha'bân, deux jours après le début de la révolte à Nadjaf, l'ayatollah Khû'î a émis un communiqué dans lequel il a souligné l'importance de respecter les lois religieuses, de ne pas toucher aux biens des gens et aux fonds publics, de bien enterrer les corps laissés dans les rues et de ne pas mutiler les cadavres. Deux jours plus tard, l'ayatollah Khû'î a publié un autre communiqué dans lequel il a nommé neuf érudits religieux pour superviser les affaires en cours. Ces personnalités étaient :

  • Sayyid Muhammad Ridâ Mûsavî Khalkhâlî
  • Sayyid Ja'far Bahr al-'Ulûm
  • Sayyid 'Izz ad-Dîn Bahr al-'Ulûm
  • Sayyid Muhammad Sabziwârî, fils de l'ayatollah Sabziwârî
  • Cheikh Muhammad Ridâ Shabîb Sa'îdî
  • Sayyid Muhammad Sâlih Sayyid Abd ar-Rasûl Kharsân
  • Muhammad Taqî Khû'î, fils de l'ayatollah Khû'i
  • Sayyid Muhammad Ridâ Kharsân
  • Sayyid Muhyi ad-Dîn Gharîfî.

Suite à la publication de ce communiqué, certains de ces érudits ont voyagé dans différentes villes pour superviser les affaires [34]. Sayyid Abd al-Ali Sabziwârî, l'un des grands savants de Nadjaf, a également émis un fatwa dans laquelle il a exprimé son soutien à al-Intifâda [35].

Sayyid Muhammad Bâqir as-Sadr a soutenu al-Intifâda et ses partisans ont joué un rôle majeur dans la révolte de Sha'bân[36].

En Iran, en raison du massacre du peuple irakien et de l'attaque des lieux sacrés, une journée de deuil national a été proclamée[37] et l'ayatollah Khamenei, le leader de la République islamique d'Iran, a émis un message à cet effet[38].

Facteurs de la défaite

Dommages au dôme du sanctuaire de Abu al-Fadl al-Abbas (a) à Karbala.

Les chercheurs ont identifié plusieurs facteurs expliquant la défaite rapide d'al-Intifâda de Sha'bân :

  • L'utilisation par le gouvernement de lourdes armes à grande puissance de destruction, telles que des canons de guerre.
  • L'emploi de forces militaires entraînées, telles que la garde républicaine irakienne, ayant accès à divers types d'armements et disposant de larges pouvoirs pour massacrer la population [39].
  • La supériorité aérienne du gouvernement et l'utilisation d'hélicoptères.
  • L'absence d'un leadership compétent, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays.
  • Le non-participation des provinces à majorité sunnite à l'Intifâda.
  • L'absence de soutien des pays de la région à l'Intifâda [40].
  • Le manque de coordination entre les différents groupes irakiens.
  • La prise de contrôle des villes irakiennes par les révolutionnaires sans planification adéquate.
  • Le manque d'esprit de coopération, de solidarité et de nationalisme parmi les groupes participants à la révolte [41].

Voir aussi

Références