Verset 142 de la sourate al-A'râf

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Verset 142 de la sourate al-A‘râf (en arabe : الآية 142 من سورة الأعراف) parle du rendez-vous de quarante jours entre le prophète Moïse (a) et Dieu, où il désigna son frère, Aaron (a) comme son successeur et lui donna des conseils.

Certains sujets théologiques chiites, comme la succession du Prince des croyants, l'Imam Ali (a), l'infaillibilité des prophètes (a), la question d’al-Bidâ’ et la supériorité du rang de l'Imamat sur celui de la prophétie, sont abordés dans le contexte de ce verset. La retraite spirituelle et le culte de quarante jours et la prière des dix premiers jours du mois de Dhu al-Hijja sont également considérées comme des rituels liés à ce verset.

La rencontre de quarante jours du prophète Moïse (a) sert de base au retraite spirituelle de quarante jours chez les soufis.

Texte et traduction du verset

وَوَاعَدْنَا مُوسَى ثَلَاثِينَ لَيْلَةً وَأَتْمَمْنَاهَا بِعَشْرٍ فَتَمَّ مِيقَاتُ رَبِّهِ أَرْبَعِينَ لَيْلَةً وَقَالَ مُوسَى لِأَخِيهِ هَارُونَ اخْلُفْنِي فِي قَوْمِي وَأَصْلِحْ وَلَا تَتَّبِعْ سَبِيلَ الْمُفْسِدِينَ ﴿۱۴۲﴾
Et Nous donnâmes à Moïse rendez-vous pendant trente nuits, et Nous les complétâmes par dix, de sorte que le temps fixé par son Seigneur se termina au bout de quarante nuits. Et Moïse dit à Aaron son frère : "Remplace-moi auprès de mon peuple, et agis en bien, et ne suis pas le sentier des corrupteurs.
Le Coran, la sourate al-A'râf, le verset 142, traduction de Hamîd Allah

Circonstance de la révélation

Selon les exégèses du Coran, le prophète Moïse (a), accompagné d'un groupe de nobles des Banî Israël, se rendit à une rencontre de trente jours avec le Seigneur. Il désigna Aaron (a) comme son successeur et guide des Banî Israël, en lui donnant des recommandations.

Cependant, ce délai fut prolongé de dix jours supplémentaires par le Seigneur. Ces dix jours correspondaient à la première décade du mois de Dhu al-Hijja, et dans ce cas, cette rencontre commença au début du mois de Dhu al-Qa‘da.[1]

Questions doctrinales du verset

Le verset contient de nombreuses discussions doctrinales et théologiques comme les questions liées à hadith d’al-Mazila[2] et le statut et la dignité des Imams (a),[3] ainsi que les débats sur l'infaillibilité des prophètes (a),[4] la supériorité du rang de l'Imamat sur celui de la prophétie[5] et la question d’al-Badâ’[6] qui font partie des croyances chiites, sont exposées dans le contexte de ce verset.

Dans un hadith rapporté par les sources chiites, les trois prophètes Adam (a) (en référence au verset 30 de la sourate al-Baqara), David (a) (en référence au verset 26 de la sourate Sâd) et Aaron (a) (en référence à ce verset 142 de la sourate al-A‘râf) étaient les califs d’Allah et l'Imam Ali (a) est le quatrième après eux.[7]

Succession du Prince des croyants, Ali (a)

Les chiites, à partir du hadith d’al-Manzila dans lequel le Prophète Muhammad (s) présenta le rang et la position de l'Imam Ali (a) par rapport à lui-même, comme la position d’Aron (a) par rapport au prophète Moïse (a)[8], déduirent la succession du Prince des croyants, l'Imam Ali (que la paix soit sur lui) après le Messager d‘Allah (s) et sa supériorité de position sur les autres Sahaba.[9] La plupart des discussions sur le hadith d’al-Manzila se rapportent au verset 142 de la sourate al-A‘râf et même le calife abbasside, al-Mamun s'appuya sur ce verset et le hadith d’al-Manzila pour prouver la succession de l'Imam Ali (a).[10]

Il existe un avis sunnite selon lequel si Moïse (a), au lieu de confier son peuple à Aaron (a) tout comme sa mère qui avait confié l'affaire à Allah, son peuple ne serait pas égaré.[11] Par conséquent, le Prophète Muhammad (s) ne commit pas une telle erreur et, conformément à la croyance sunnite, il confia son peuple à Dieu.[12]

Cela alors que la succession du Commandeur des croyants, l'Imam Ali (a) fut prouvée avec des preuves authentiques et des témoignages décisifs des trois sources du Coran, de la Tradition et de l'Histoire.[13]

Infaillibilité du Prophète Aron (a)

Les exégètes chiites du Coran, en réponse à la question de savoir si l'interdiction d'Aaron (a) par le prophète Moïse (a) dans le verset (Ne suis point le chemin des Semeurs de scandale !) peut être une preuve de son absence d'infaillibilité, dirent que : Le fait d'ordonner ou d'interdire quelque chose à quelqu'un ne signifie pas que cette personne (celle à qui il fut ordonné ou interdit) accomplit ou avait l'intention d'accomplir cet acte.[14]

De plus, l'interdiction à Aaron (a) peut avoir une dimension éducative pour les Banî Israël,[15] signifiant que le prophète Moïse (a) ne voulait pas dire directement aux Banî Israël qu'ils ne devraient pas faire cela. Par conséquent, il dit à son frère, Aaron (a), de ne pas le faire de cette manière, indirectement, afin de faire un travail éducatif.[16]

Epreuve des gens par Dieu

Articles connexes : veau de Samarie et al-Bidâ’.

En plus du verset 142 de la sourate al-A‘râf, Allah mentionne également cette rencontre avec Moïse (a) dans le verset 51 de la sourate al-Baqara. Dans le verset 51 de la sourate al-Baqara, les quarante jours sont mentionnés au singulier (....). Cependant, dans le verset 142 de la sourate al-A‘râf, il est mentionné d'abord trente jours, puis dix jours supplémentaires sont ajoutés. Les exégèses coraniques expliquèrent certaines subtilités concernant cette divergence dans l'expression.

Par exemple, nous lisons dans le livre de Tafsîr Nimûni :

ce qui concorde le plus avec les hadiths des Ahl al-Bayt (a), c'est que bien qu'en réalité il s'agissait de 40 nuits, Dieu convoqu d'abord le prophète Moïse (a) pour 30 nuits afin de mettre à l'épreuve les Banî Israël, puis prolongea ce délai, pour que les hypocrites parmi les Banî Israël se dévoilent.[17]

L'Imam Ja‘far as-Sâdiq (a) :

« Quand Moïse partit rencontrer son Seigneur, il fit pacte avec son peuple pendant trente jours. Lorsque Dieu ajouta dix jours aux trente jours, son peuple dit : Moïse nous a trahis. C'est alors qu'ils firent ce qu'ils firent. »[18]

Ce hadith explique la divergence dans la mention des 30 et 40 jours dans le Coran. Initialement Moïse (a) avait fixé une rencontre de 30 jours, mais Allah prolongea ce délai à 40 jours pour mettre à l'épreuve le peuple du prophète Moïse (a). Dans un autre hadith, l’Imam (a) présente le changement de trente à quarante jours comme al-Bidâ’ de la part de Dieu.[19]

Supériorité du rang de l'Imamat sur la prophétie

Certains exégètes du Coran croient que le verset 142 de la sourate al-A‘râf fait référence à la supériorité du rang de l'Imamat sur celui de la prophétie, car avant d'être désigné par le prophète Moïse (a) comme son successeur et Imam et guide des Banî Israël, Aaron (a) avait déjà le rang de la prophétie.

En d'autres termes, lorsque le prophète Moïse (a) voulut se rendre à la rencontre divine, il choisit son frère, Aaron (a), comme successeur. À cette époque, Aaron (a) était prophète. La question est qu’Aaron (a) était lui-même un prophète de Dieu, désigné par Allah pour guider les gens, alors pourquoi le prophète Moïse (a) le choisit pour être son successeur et guide des Banî Israël ?

La réponse devient claire quand on comprend qu'il y a une différence entre le rang de prophète et celui d'Imam. Aaron (a) était prophète mais il n'était pas apte à assumer pleinement le leadership des Banî Israël. Ce rôle suprême était réservé au prophète Moïse (a). Cependant, quand il dut s'absenter, il désigna son frère comme Imam et guide du peuple. Cela montre que le rang d'Imam est supérieur à celui du prophète.[20]

Rits liés

Une page du livre de Mafâtîh al-Jinân dans laquelle il se fait référence au verset 142 de la sourate al-A‘râf concernant la prière de la première décade du mois de Dhu al-Hijja.[21]

Retraite spirituelle de quarante jours

Les quarante jours de retraite spirituelle et d'adoration, du premier jour du mois de Dhu al-Qa‘da jusqu'au dixième jour du mois de Dhu al-Hijja, ont des actes particuliers.[22]

Durant cette retraite, le prophète Moïse (a) n'avait ni sommeil ni nourriture et était occupé aux invocations devant Dieu sur le mont Tur. Ayatollah Jawâdî Âmulî mentionne que c'est grâce à cette retraite que le prophète Moïse (a) reçut la Torah et la révélation divine.[23]

Prière de la première décade du mois de Dhu al-Hijja

D’après les hadiths chiites, durant la première décade de Dhu al-Hijja, une priète de deux Rak‘a se fait entre la prière d’al-Maghrib et celle d’al-‘Ishâ’. Cette prière est connue sous le nom de « Prière de la première décade de Dhu al-Hijja ». Conformément aux hadiths, la manière d'accomplir cette prière est la suivante : dans chaque Rak‘a, après la récitation des sourates al-Fâtiha et at-Tawhîd, le verset 142 de la sourate al-A‘râf est récité.[24]

Voir aussi

Références

  1. Al-Qummî, Tafsîr al-Qummî, vol 1, p 239, 1404 H ; Makârim Shîrâzî, Tafsîri Nimûni, vol 6, p 341, 1374 SH ; Fakhar ad-Dîn ar-Râzî, Mafâtîh al-Ghayb, vol 14, p 352, 1420 H
  2. Makârim Shîrâzî, Tafsîri Nimûni, vol 6, p 344, 1374 SH
  3. Makârim Shîrâzî, Tafsîri Nimûni, vol 6, p 341, 1374 SH
  4. Al-'Allâma Tabâtabâ'î, al-Mîzân, vol 8, p 236, 1417 H ; Makârim Shîrâzî, Tafsîri Nimûni, vol 6, p 342, 1374 SH ; Najafî Khumiynî, Tafsîri Âsân, vol 5, p 337, 1398 H
  5. Makârim Shîrâzî, Tafsîri Nimûni, vol 6, p 341, 1374 SH
  6. Al-'Allâma Tabâtabâ'î, al-Mîzân, vol 1, p 198, 1417 H
  7. cheikh as-Sadûq, 'Uyûn Akhbâr ar-Ridâ, vol 2, p 9, 1387 H ; al-'Allâma al-Majlisî, Bihâr al-Anwâr, vol 36, p 417, 1403 H
  8. Institut de recherche islamique, Farhangi Shî'a, p 226, 1386 SH
  9. Mîr Hâmid Husayn, 'Abaqât al-Anwâr, vol 11, p 181 et 369, 1366 SH
  10. Tihrânî, Imamshinâsî, vol 9, p 113-114, 1418 H
  11. Al-Bukhârî, Sahîh al-Bukhârî, Sharh at-Ta'arruf li Madhhab at-Tasawwuf, vol 4, p 1517, 1363 SH
  12. Miybudî, Kashf al-Asrâr, vol 3, p 139, 1371 SH
  13. Al-'Allâma Amînî, Takmilat al-Ghadîr, vol 1, p 48, 1429 H
  14. Najafî Khumiynî, Tafsîri Âsân, vol 5, p 337, 1398 H
  15. Makârim Tafsîri Nimûni, vol 6, p 342, 1374 SH
  16. Tihrânî, Imâmshinâsî, vol 10, p 166, 1418 H
  17. Makârim Shîrâzî, Tafsîri Nimûni, vol 6, p 340, 1374 SH
  18. Al-Bahrânî, al-Burhân fî Tafsîr al-Qur'ân, vol 2, p 580, Publication al-Bi'tha
  19. Al-'Ayyâshî, Tafsîr al-'Ayyâshî, vol 1, p 44, H 46 ; al-'Allâma Tabâtabâ'î, al-Mîzân, vol 1, p 198, 1417 H
  20. Makârim Shîrâzî, Tafsîri Nimûni, vol 1, p 311, et vol 6, p 341, 1374 SH
  21. Al-Qummî, Mafâtîh al-Jinân (LES CLÉS DU PARADIS), traduction de par un groupe des traducteurs, p 967
  22. Mansûrî Lârîjânî, Dar Mahdar Hâfiz, vol 2 p 233, 1390 HS
  23. Jawâdî Âmulî, Arba'îngîrî az Bihtarîn Râhhâyi Daryâfti Fuyûdât
  24. Sayyid b. Tâwûs, Iqbâl al-A'mâl, vol 1, p 317, 1409 H ; al-Hurr al-'Âmilî, Wasâ'il ash-Shî'a, vol 8, p 183, 1409 H