Voyage (fiqh)

De wikishia

Voyage (en arabe : السفر الشرعي) dans le fiqh islamique, fait référence au voyage où toutes les prières de quatre Rak‘a doivent se faire en deux Rak‘a. Autrement dit, il faut raccourcir les prières az-Zuhr, al-‘Asr et al-‘Ishâ’ et le voyageur doit les effectuer en deux Rak‘a. Aussi, pendant le voyage, il n'est pas permis de jeûner.
Le précepte concernant le jeûne du voyageur est mentionné dans le verset 184 de la sourate al-Baqara, et le précepte concernant la prière du voyageur est mentionné dans le verset 101 de la sourate an-Nisâ’.

Dans les livres de « Tawdîh al-Masâ’il », huit conditions sont énoncées pour qu'un voyage puisse entraîner le raccourcissement de la prière et l'annulation du jeûne, y compris : la distance du voyage doit être d'au moins huit Farsakh[Note 1] (entre 40 et 45 kilomètres) et la distance aller ne doit pas être inférieure à quatre Farsakh.
Une des préceptes du voyage est que celui qui voyage pour commettre un acte interdit (haram) doit faire ses prières complètement et, s'il se trouve pendant le mois du Ramadan, doit jeûner.

Sens du concept

Le voyage selon le fiqh fait référence au voyage où il est obligatoire de raccourcir la prière, et le jeûne du voyageur n'est pas permis.[1] D’après les préceptes de la loi islamique, une personne est considérée comme voyageur lorsqu'elle quitte sa résidence et remplit les conditions spécifiées, et elle est soumise à des préceptes particuliers qui s'appliquent à elle.[2]

Conditions du voyageur

Selon la jurisprudence islamique, on considère qu'une personne est un voyageur si elle remplit les huit conditions suivantes :

  1. La distance du voyage aller-retour doit être d'au moins huit Farsakh (entre 40 et 45 kilomètres), et la distance du voyage aller ne doit pas être inférieure à quatre Farsakh.
    Farsakh est une ancienne mesure de distance et chaque Farsakh valait environ entre 5 et 5/5 kilomètres.
    Alors, si la distance du voyage aller-retour est inférieure à huit Farsakh ou si la distance du voyage aller est inférieure à quatre Farsakh, le voyageur devra accomplir ses prières complètement et observer le jeûne pendant le mois du Ramadan.
  2. Dès le début du voyage, il doit avoir l'intention de parcourir huit Farsakh.
    Donc, si une personne quitte son lieu de résidence sans l'intention de voyager, mais qu'elle décide de voyager, par exemple, sur une distance de quatre Farsakh, elle devra compter huit Farsakh à partir du point où elle a l'intention de voyager afin de raccourcir sa prière.
  3. Il ne doit pas annuler l'intention de voyager en cours de route.
  4. Il ne passe pas par son lieu de résidence pendant le voyage ou il ne séjourne pas pendant dix jours ou plus dans un endroit.
    Donc, si quelqu'un se trouve à une distance de, par exemple, quatre Farsakh de son lieu de résidence et qu'il veut voyager et se rendre à un endroit situé à dix Farsakh de là où il se trouve actuellement, dans ce cas, s'il passe par son lieu de résidence et atteint le point souhaité, il ne sera pas considéré comme un voyageur selon le fiqh. Cela est dû au fait qu'en réalité, il a parcouru seulement six Farsakh. Les quatre Farsakh initiaux qu'il a parcourus pour atteindre son lieu de résidence ne sont pas pris en compte, et il doit calculer son voyage à partir de son lieu de résidence, et non du point initial où il se trouvait. D’après cette hypothèse, il n'a parcouru que six Farsakh et non dix Farsakh.
  5. Il ne doit pas voyager dans le but de commettre un acte interdit (haram).
    Si quelqu'un voyage dans le but de commettre un acte illicite tel que le vol, même si son voyage dépasse plus de huit Farsakh, il doit quand même accomplir ses prières complètement et observer son jeûne.
  6. Il ne doit pas être un nomade qui se déplace dans le désert, s'arrêtant là où il trouve de la nourriture et de l'eau pour lui-même et ses animaux, puis se déplaçant ailleurs après un certain temps.
  7. Il ne doit pas voyager fréquemment comme celui qui a une profession liée aux voyages, comme un chauffeur.
    Dans le cas où quelqu'un exerce une profession nécessitant des voyages fréquents, comme un chauffeur qui est constamment en voyage ou un étudiant dont le lieu d'études diffère de son lieu de résidence voyageant régulièrement entre son domicile et la ville où il étudie, dans ces cas, le chauffeur et l'étudiant doivent accomplir leurs prières complètement et observer le jeûne. Les obligations religieuses de la prière complète et du jeûne ne sont pas annulées en raison de voyages fréquents.
  8. Il doit atteindre Hadd at-Tarakhkhus, c'est-à-dire qu'il s'éloigne suffisamment de sa ville pour ne plus voir ses remparts et n'entendre plus l'appel à la prière (Adhân).
    « Hadd at-Tarakhkhus » (le point de la permission) est la distance à partir de laquelle le voyageur doit raccourcir ses prières de quatre Rak‘a et les fait en deux Rak‘a, et il doit rompre son jeûne. Ce point est atteint lorsque l'appel à la prière (Adhân) de la ville n'est plus audible ou que les murs de la ville ne sont plus visibles.

Dans le Coran et hadiths

Dans le verset 184 de la sourate al-Baqara, il est mentionné :

« [Jeûnez] des jours comptés ! Celui qui, parmi vous, sera malade ou en voyage [jeûnera] un nombre [égal] de jours. … »

Certains juristes se réfèrent à ce verset pour déterminer le précepte juridique du jeûne pour les voyageurs.[3]

Dans le verset 101 de la sourate an-Nisâ’, il est également parlé de la question de la prière pendant le voyage :

« Quand vous parcourez la terre, il n'y a pas de grief à vous faire d'abréger la Prière, …  »

Certains livres de jurisprudence se réfèrent à ce verset pour énoncer le précepte de la prière pendant le voyage.[4]

Dans le livre « Wasâ’il ash-Shî‘a », dans la section « la prière du voyageur », 248 hadiths sont rapportés concernant les préceptes de la prière du voyageur.[5] De plus, 99 hadiths sont mentionnés dans les sections relatives au jeûne du voyageur.[6]

Prière du voyageur

Article connexe : Prière al-Qasr.

Voici quelques préceptes concernant la prière du voyageur :

  • Le voyageur doit raccourcir les prières de Zuhr, ‘Asr et ‘Ishâ’ ; c'est-à-dire qu'il doit les effectuer en deux Rak‘a au lieu de quatre Rak‘a.[7]
  • Lorsqu'un voyageur atteint la limite de son lieu de résidence (Hadd at-Tarakhkhus), il doit commencer à raccourcir ses prières ; Hadd at-Tarakhkhus, c'est-à-dire qu'il doit s'éloigner de sa ville au point de ne plus voir ses murs ni entendre l'appel à la prière (Adhân) de la ville.[8]
  • Si, pendant un voyage, l'heure de la prière arrive mais que le voyageur n'a pas encore fait sa prière et qu'il retourne dans sa patrie avant la fin de l'heure de la prière, il doit effectuer la prière complète. De même, s'il n'a pas encore commencé son voyage et que l'heure de la prière arrive, mais qu'il n’accomplit pas la prière et part en voyage, s'il reste du temps pour la prière, il doit la raccourcir.[9]
  • Si une prière doit être compensée (Salât al-Qadâ’), elle doit être effectuée de la même manière que celle qui aurait dû être initialement effectuée ; c'est-à-dire que si elle aurait dû être raccourcie, elle doit être compensée de manière raccourcie, même si le voyageur n'est plus en voyage. De même, si elle aurait dû être complète, elle doit être compensée de manière complète, même si le voyageur est en voyage.[10]

Par exemple, si quelqu'un ne fait pas la prière de Zuhr dans son lieu de résidence. Si cette personne part en voyage, elle doit effectuer les prières de quatre Rak‘a (Zuhr, ‘Asr et ‘Ishâ’) en version raccourcie. Cependant, si elle souhaite effectuer la prière de Zuhr qui a été manquée dans son lieu de résidence pendant son voyage, elle doit la faire de manière complète et en quatre Rak‘a. De même, si quelqu'un est en voyage et ne fait pas la prière de Zuhr, s'il retourne dans son lieu de résidence et souhaite accomplir la prière de Zuhr qui a été manquée pendant son voyage, il doit la faire en deux Rak‘a. C'est parce que sa responsabilité à l'époque où sa prière a été manquée était de l’effectuer en deux Rak‘a, donc maintenant lorsqu'il souhaite compenser cette prière, il doit accomplir la même responsabilité qu'il avait à ce moment-là.

  • Si quelqu'un voyage dans le but de commettre un acte illicite, tel que le vol, il doit effectuer ses prières complètes.[11]

Jeûne du voyageur

Voici quelques préceptes concernant le jeûne du voyageur :

  • Un voyageur qui doit faire les prières de quatre Rak‘a en version raccourcie (deux Rak‘a), il n’est pas permi pour lui de jeûner, et un voyageur qui doit effectuer ses prières complètement, tout comme quelqu'un dont le travail est de voyager ou dont le voyage est lié à une désobéissance, doit jeûner pendant son voyage.[12]
    En d'autres termes, le jeûne suivie la prière. Dans tout voyage où le voyageur doit faire ses prières en version raccourcie, il ne peut pas jeûner. Et dans tout voyage où il doit accomplir ses prières complètement, il doit également jeûner.
  • Si une personne qui jeûne voyage après midi (le déclin du soleil), elle doit compléter son jeûne. Si elle voyage avant midi, lorsqu’il atteint Hadd at-Tarakhkhus (le point de la permission), elle doit rompre son jeûne.[13]
  • Le voyage pendant le mois du Ramadan n'est pas interdit, mais si c'est dans le but d'éviter le jeûne, cela est déconseillé.[14]
  • Si un voyageur arrive dans sa patrie ou dans un endroit où il veut rester dix jours après midi, il ne peut pas jeûner ce jour-là.[15] Mais, s’il arrive dans sa patrie ou dans un endroit où il veut rester dix jours avant midi, s'il n'accomplit pas un acte qui annule le jeûne, il doit jeûner ce jour-là, mais si cet acte est accompli, le jeûne de ce jour n'est pas obligatoire pour lui.[16]

Par exemple, si un voyageur atteint son lieu de résidence avant midi, mais avant qu’il arrive sa patrie et pendant le voyage, il mange quelque chose. Dans ce cas, même s’il arrive sa patrie avant midi, il ne peut pas jeûner ce jour-là et doit rattraper son jeûne un autre jour.

Point de vue des sunnites

Les savants sunnites considèrent le jeûne pendant un voyage comme permis. Solen leur fatwa, le voyageur a le droit de jeûner ou de ne pas jeûner.[17] En ce qui concerne la prière pendant un voyage, ils ont le même avis, à l'exception des hanafites et des koufites, qui estiment qu'elle doit être raccourcie.[18]

Note

  1. Ancienne mesure de distance qui valait environ entre 5 et 5/5 kilomètres

Références

  1. Mu’ssisiyi Dâ’irat al-Ma‘ârif al-fiqh al-Islâmî, Farhang Fiqh, vol 4, p 469
  2. Banî Hâshimî, Tawdîh al-Masâ’il Marâji‘, vol 1, p 683
  3. ‘Allâma al-Hillî, Muntaha al-Matlab, vol 9, p 315 ; Fâdil Kâzimî, Masâlik al-Afhâm, vol 1, p 332 - 333
  4. Mûsawî Sabziwârî, Muhadhdhab al-Ahkâm, vol 9, p 309 ; Ayatollah Subhânî, al-Insâf, vol 1, p 325
  5. Cheikh al-Hurr al-‘ milî, Wasâ'il ash-Shî'a, vol 8, p 451 - 539
  6. Cheikh al-Hurr al-‘ milî, Wasâ'il ash-Shî'a, vol 10, p 173 - 209
  7. Banî Hâshimî, Tawdîh al-Masâ’il Marâji‘, vol 1, p 683
  8. Banî Hâshimî, Tawdîh al-Masâ’il Marâji‘, vol 1, p 707
  9. Banî Hâshimî, Tawdîh al-Masâ’il Marâji‘, vol 1, p 733
  10. Banî Hâshimî, Tawdîh al-Masâ’il Marâji‘, vol 1, p 733
  11. Banî Hâshimî, Tawdîh al-Masâ’il Marâji‘, vol 1, p 695
  12. Banî Hâshimî, Tawdîh al-Masâ’il Marâji‘, vol 1, p 951
  13. Banî Hâshimî, Tawdîh al-Masâ’il Marâji‘, vol 1, p 953
  14. Banî Hâshimî, Tawdîh al-Masâ’il Marâji‘, vol 1, p 951
  15. Banî Hâshimî, Tawdîh al-Masâ’il Marâji‘, vol 1, p 953
  16. Banî Hâshimî, Tawdîh al-Masâ’il Marâji‘, vol 1, p 994
  17. Sharaf ad-Dîn, Mawsû‘at al-Imâm Sharaf ad-Dîn, vol 4, p 56
  18. Sharaf ad-Dîn, Mawsû‘at al-Imâm Sharaf ad-Dîn, vol 4, p 51