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Dîwân de l’Imam Ali (a)

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Dîwân de l'Imam Ali (a)

Dîwân de l’Imam Ali (a) (en arabe : ديوان الإمام علي (ع)) ou Le recueil poétique de l’Imam Ali (a) est une compilation de poèmes en arabe. Cependant, les érudits et chercheurs musulmans estiment que seule une petite partie de ces poèmes a été composée par l’Imam lui-même. La majorité des poèmes sont soit des compositions d'autres poètes écrites en hommage à l’Imam Ali (a), soit des poèmes transmis de son époque, ou encore des paroles qu’il aurait rapportées d’autres personnes.

Ces poèmes ont été rassemblés des siècles après l’époque de l’Imam Ali (a). La plus ancienne compilation connue est celle de Abd al-'Azîz al-Jallûdî, décédé en 322 H. Selon les différentes versions, le nombre des poèmes varie entre 190 et 506 fragments. Le Diwân actuellement diffusé correspond principalement à l’ouvrage intitulé Anwâr al-‘Uqûl fî Ash‘âr Wasîyy ar-Rasûl de Qutb ad-Dîn Kîdarî al-Bayhaqî (décès en 548 H).

Plusieurs indices remettent en question l’attribution de la majorité des poèmes à l’Imam Ali (a) : La présence de poèmes en mètre Rajaz, souvent associés à des compositions populaires, des vers faisant l’éloge de tribus spécifiques, un manque de finesse stylistique et rhétorique dans certains passages, une vantardise apparente dans certains poèmes, contraire au caractère de l’Imam Ali (a), des références à des proverbes liés à des cultures étrangères, comme les Perses, les Romains et les Grecs, l’inclusion de concepts philosophiques apparus au IIᵉ siècle de l’Hégire luniare parmi les musulmans.

Selon Âqâ Buzurgi Tihrânî, les premières éditions imprimées du Dîwân incluent : Une impression à Leyde (Pays-Bas) en 1745, une impression à Boulaq (Égypte) en 1251 H, une autre impression au Caire en 1276 H, une édition à Téhéran en 1284 H. Le Dîwân a été traduit et commenté en plusieurs langues, notamment le persan, le latin, le turc et l’ourdou. De nombreuses éditions modernes sont disponibles aujourd'hui, témoignant de son influence durable malgré les débats sur son authenticité.

Attribution des poèmes à l’Imam Ali (a)

Les savants chiites considèrent que la majorité des poèmes contenus dans le Dîwân attribué à l’Imam Ali (a) ne lui appartient pas. Al-'Allâma al-Majlisî, tout en doutant de l’authenticité de l’ensemble des poèmes attribués à l’Imam (a), estime que beaucoup de ces vers proviennent d’autres sources. Il a rapporté les propos d’Ibn Shahrâshûb selon lesquels le Dîwân aurait été compilé par une personne nommée Ali b. Ahmad Fanjgardî, un érudit littéraire de Nishâpûr, décédé en 513 H. [1]

Hasan Hasanzâdi Âmulî, dans le livre Takmîli Minhâj al-Barâ‘a, affirme que de nombreux poèmes présents dans ce recueil sont en réalité l’œuvre d’autres poètes, dont il mentionne parfois les noms. [2] Selon certaines estimations, seulement 10 % des poèmes du Dîwân pourraient être véritablement attribués à l’Imam Ali (a). Le reste se retrouve soit dans d’autres recueils poétiques, soit est attribué à d’autres auteurs. [3]

Raisons de la non-attribution de tous les poèmes du Dîwân à l’Imam Ali (a)

Plusieurs arguments sont avancés pour contester l’attribution de l’ensemble des poèmes du Dîwân à l’Imam Ali (a). Dans l’introduction de l’édition du Dîwân de al-Imâm Ali (as) réalisée par Maktabat al-Îmân au Caire, dix objections sont soulevées contre cette attribution :

La présence de poèmes dans un mètre rajaz, une forme souvent associée à des vers populaires et simples, des poèmes faisant l’éloge de tribus, un style inhabituel pour l’Imam Ali (a), une faiblesse générale dans l’éloquence et la rhétorique de certains poèmes, des poèmes contenant des expressions de vanité, contraires à la personnalité de l’Imam (a), une abondance de poèmes échangés entre l’Imam (a), Muawiya, et ʿAmr b. al-ʿÂs, ce qui semble anachronique, Des erreurs dans les règles métriques (ʿArûd) et les schémas rythmiques.[4]

En plus des points mentionnés, Kiyvân Samîʿî identifie les éléments suivants comme preuves de la non-authenticité :

  • La présence de mots persans dans les poèmes.
  • L’usage de proverbes liés aux cultures persane, romaine, et grecque.
  • Des divisions philosophiques datant du IIᵉ siècle de l’Hégire lunaire, absentes au temps de l’Imam.
  • La présence d’énigmes (Muʿammâ) et de devinettes (Lughaz), pratiques peu répandues dans la culture arabe de l’époque. [5]

Bien que l’Imam Ali (a) soit reconnu pour sa grande éloquence et sa maîtrise de la rhétorique, sa qualité de poète reste discutée. Des auteurs comme Jâhiz (IIᵉ et IIIᵉ siècle de l’Hégire lunaire) et Yâqût al-Hamawî (VIᵉ et VIIᵉ siècle H) ne le considèrent pas comme un poète.

Jâhiz affirme que l’Imam (a) n’a composé que quelques vers en rajaz. Yâqût attribue uniquement deux vers à l’Imam Ali (a), considérant les autres comme des ajouts ultérieurs. [6]

D’autres figures comme at-Tabarî, Ibn Qutayba, Ibn Miskawayh ar-Râzî, az-Zamakhsharî, at-Tabrisî, et Sharîf ar-Radî ont transmis des poèmes de l’Imam (a) sans le classer parmi les poètes. [7] Malgré cela, certains auteurs comme ash-Shaʿbî, Ibn ʿAbd Rabbih (poète arabe des IXᵉ et Xᵉ siècles H), et al-Qalqashandî (poète et écrivain égyptien, m. 821 H.) considèrent l’Imam Ali (a) comme un poète. Il a affirmé même que l'Imam (a) surpassait en poésie des figures comme Abu Bakr et Umar b. al-Khattab.[8]

Nombre et la classification des poèmes dans le Diwân

Les éditions publiées du Dîwân diffèrent considérablement quant au nombre de poèmes qu’elles contiennent. Selon les versions, le Dîwân inclut : 190 pièces, 355 pièces, 374 pièces, 455 pièces, et jusqu’à 506 pièces. [9]

Dans un article de recherche consacré au Dîwân, les poèmes sont répartis en quatre catégories principales :

  1. Inshâ’ (Créations originales) : Les poèmes directement composés par l’Imam Ali (a).
  2. Hikâyât (Narrations) : Des vers composés par d’autres poètes pour mettre en forme les paroles de l’Imam (a).
  3. Inshâd (Citations) : Les poèmes d’autres auteurs que l’Imam (a) a cités dans ses discours.
  4. Mawdûʿ (Thèmes) : Les poèmes composés par les partisans de l’Imam Ali (a), mais attribués à lui pour exprimer leur dévotion. [10]

Dans son introduction à la traduction de l’ouvrage Anwâr al-ʿUqûl, Abû al-Qâsim Imâmî propose une classification plus détaillée. Aux quatre catégories précédentes, il ajoute deux autres groupes : Descriptions poétiques d’événements liés à l’Imam (a) : Des poèmes narratifs relatant des faits historiques associés à l’Imam Ali (a).

Rajaz des adversaires de l’Imam (a) dans les batailles : Des vers de défi récités par les ennemis de l’Imam (a) sur le champ de bataille. [11]

Thèmes abordés dans le Dîwân de l’Imam Ali (a)

Les poèmes du Dîwân de l’Imam Ali (a) couvrent une variété de sujets, parmi lesquels :

  • La dignité humaine : La réflexion sur la condition humaine et ses aspirations.
  • L’unicité de Dieu et la connaissance divine (Tawhîd et Maʿrifat) : Des vers exprimant la grandeur de Dieu et le lien entre le croyant et son Créateur.
  • L’au-delà et la Résurrection (âkhirat et Maʿâd) : Des méditations sur la vie après la mort et les réalités de l’au-delà.
  • Les invocations et supplications (Munâjât).
  • Les principes éthiques et moraux (Masâ’il Akhlâqîyya).
  • Les éloges et lamentations (Madâ’ih wa Marâthî).
  • Les conseils et recommandations (Wasâyâ).
  • L’auto-présentation et les rajaz : Des poèmes dans lesquels l’Imam (a) se présente ou exprime sa bravoure dans les batailles.

D’autres thèmes plus spécifiques sont également évoqués, tels que :

  • Les jours de la semaine.
  • Le destin et la prédestination (Qismat wa Qadar).
  • La vieillesse et la jeunesse.
  • Le travail et l’effort.
  • La richesse et la pauvreté.
  • Les voyages et leurs significations. [12]
  • Histoire de la compilation du Dîwân de l'Imam Ali (a)

Selon les chercheurs, même si l'attribution des poèmes à l’Imam Ali (as) est correcte, leur compilation n'a certainement pas été réalisée de son vivant ou par lui-même. [13]

Les premières compilations mentionnées par Aqâ Buzurgi Tihrânî dans le livre adh-Dharîʿa incluent dix-sept recueils. Voici quelques exemples des plus anciennes :

  • Shiʿr Ali (mentionné par an-Najâshî), écrit par ʿAbd al-ʿAzîz Jalûdî (décédé en 322 H).
  • Salwat ash-shîʿa wa Tâj al-Ashʿâr, écrit par Ali b. Ahmad Fanjgardî Niyshâbûrî (décédé en 513 H).
  • Dîwân Amîr al-Muʾminîn, compilé par Ibn al-Shajari (décédé en 543 H).
  • Al-Hadîqa al-Anîqîyya, écrit par Muhammad b. Husayn Kidrî al-Biyhâqî (décédé en 548 H).
  • Anwâr al-ʿUqûl, également écrit par Muhammad b. Husayn Kidrî al-Biyhâqî (décédé en 548 H).
  • Dîwân Amîr al-Muʾminîn ʿala ar-Riwâyât ash-Sahîha, compilé par Sayyid Muhsin al-Amîn en 1360 H. [14]

Selon Aqâ Buzurg Tihrânî, le Dîwân actuellement répandu est basé sur l’ouvrage Anwâr al-ʿUqûl fî Ashʿâr Wasî ar-Rasûl de Kidrî al-Biyhâqî. [15] Sayyid Muhsin al-Amîn affirme que l’auteur ou le compilateur exact du Dîwân n'est pas connu. Il doute que des érudits comme Jalûdî, Ibn ash-Shajarî ou Kidrî aient rassemblé des poèmes contenant des erreurs ou des éléments indignes d’être attribués à l’Imam (a). Cependant, cette critique a été nuancée par des chercheurs. Certains estiment que le Diwân actuel ne peut être clairement identifié comme celui compilé par ces auteurs. De plus, si le Dîwân actuel est bien celui de Kidrî, il aurait entrepris de préserver tout ce qui est attribué à l’Imam (a), même avec des éléments douteux. [16]

Editions du Dîwân de l'Imam Ali (a)

Le Dîwân de l’Imam Ali (a) a été publié à plusieurs reprises. [17] Parmi les éditions anciennes mentionnées par Aqâ Buzurgi Tihrânî, on trouve :

  • L’édition de Bûlâq (Égypte) en 1251 H.
  • Une autre édition au Caire en 1276 H.
  • L’édition de Téhéran en 1284 H.
  • L’édition de l’Imprimerie scientifique au Caire en 1311 H.
  • De plus, Aqâ Buzurgi mentionne une édition à Leyde (près de La Haye, aux Pays-Bas) avec un commentaire en latin, publiée en 1745. [18]

Parmi les éditions plus récentes, on trouve :

  • Dâr al-Kitâb al-ʿArabî (Beyrouth), avec un commentaire de Yûsuf Farhât (1411 H).
  • Maktabat al-Îmân (Égypte), éditée par le Markaz al-Bayân al-ʿIlmî.
  • Dâr al-Mahajja al-Baydâʾ, éditée par Kâmil Salmân al-Jabûrî. [19]

Traductions et commentaires

Le Dîwân a été traduit en plusieurs langues, notamment en persan, latin, turc et ourdou. Voici quelques traductions notables :

  • Dîwân Hazrat Ali (a), traduit en persan par Muhammad Jawâd Najafî (1384 H).
  • Dîwân Imam Ali (a), traduit par Abû al-Qâsim Imâmî (1373 SH).
  • Dîwân Amîr al-Muʾminîn Imam Ali (a), traduit par Mustafa Zamânî (1362 SH).
  • Une traduction en latin, publiée par Cui Pierce en 1745. [20]
  • Des traductions poétiques existent également, parmi lesquelles :
  • Une traduction en persan par Mirzâ Ibrâhîm Amînî Hiravî (mort au Xe siècle H).
  • Une traduction en turc par Saʿd ad-Dîn Mustaqîmzâdih, publiée à Damas en 1312 H.
  • Une traduction en ourdou, publiée à Karachi en 1976, réalisée par Innâʾî Shâhid. [22]
  • Parmi les commentaires, on peut citer celui de Mîr Husayn b. Muʿîn ad-Dîn Miybudî (mort en 909 H), édité par Hasan Rahmânî et Sayyid Ibrâhîm Ashk. Ce commentaire a été publié par le Centre pour la publication des patrimoines manuscrits en 1379 SH. [23]

Références