Troisième témoignage

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Troisième témoignage ou Ash-Shahâdat ath-Thâlitha (arabe : الشَهادَة الثالِثة) est de témoigner à la wilaya de l'Imam Ali (a). Ce témoignage est formulé après avoir témoigné de l'Unicité de Dieu et de la Prophétie du Prophète Muhammad (s). On le récite ainsi : "Je témoigne que Ali est le wali (représentant) d'Allah' (أشهَدُ أَنّ عَلیاً ولی‌ُّ الله) ou je témoigne que Ali est la preuve d'Allah' (أشهَدُ أَنّ عَلیاً حُجَّةُ الله).

Il s'agit d'une caractéristique du chiisme autour de laquelle il y a toutefois, des désaccords jurisprudentiels.

Selon certains hadiths, chaque fois que l'on témoigne de l'Unicité de Dieu et de la Prophétie de Muhammad (s), il faut aussi témoigner de la wilaya de Ali b. Abi Talib (a). La principale question au sujet du Troisième Témoignage concerne l'adhân et l'iqâma avant les prières journalières (as-Salât). Toutefois, dans les sources chiites de fiqh et de hadith, le Troisième Témoignage n'est pas considéré comme faisant obligatoirement partie de l'adhân ou de l'iqâma, mais il est permis même conseillé (mustahab) de le réciter avec l'intention du rapprochement de Dieu (qasd qurbat).

Notion

Ash-Shahâdat ath-Thâlitha, ou le Troisième Témoignage, suit le Shahâdatayn (témoignage de l'unicité de Dieu et de la Prophétie de Muhammad (s)) et consiste en un témoignage de la wilaya de Ali b. Abi Talib (a).

Elle s'exprime généralement par les phrases suivantes :

أشهَدُ أَنّ عَلیاً ولی‌ُّ الله
أشهَدُ أَنّ عَلیاً حُجَّةُ الله
أشهَدُ أَنّ عَلیاً اَمیرُالمؤمنین حقاً
Ali est le maître désigné par Allah
Ali est la preuve d'Allah
Ali est à juste titre le commandeur des croyant
Hakîm Ilâhî, "Shahâdat-i thâlitha az bid'at tâ wujûb", p. 145

Dans certains hadiths, il est recommandé de témoigner de la wilaya de Ali b. Abi Talib (a) juste après avoir témoigné de l'Unicité de Dieu et de la Prophétie de Muhammad (s)[1]. La question du troisième témoignage est principalement discutée dans les questions d'adhân et de l'iqâma. Il est aussi discuté dans les questions d'at-tashahhhud dans les prières [2].

Dans l'Adhân et l'Iqâma

Les questions relatives à la récitation du Troisième Témoignage en adhân ou en iqâma concernent principalement le contexte (historique) de la jurisprudence (fiqh) à son sujet.

Contexte historique

Le Troisième Témoignage, on le sait, est officiellement entré dans l'adhân chiite à partir de l'époque Safavide. Cependant, il y a des preuves qui montrent qu'il était récité parmi certains groupes de différentes régions avant cette époque. Par exemple, Ibn Batûta parlait, aux VIIIe et XIVe siècles, de la récitation de "Je témoigne que Ali est le wali d'Allah" (اشهد ان علیاً ولی‌ُّ الله) parmi les adeptes chiites du Qatif [3]; de même, certains propos de Cheikh as-Sadûq par rapport à des hadiths concernant l'admissibilité du Troisième Témoignage [4] montrent que certains groupes dans son temps, le récitaient aussi.

Abd al-Muhsin as-Sarâwî pense que la récitation de " Je témoigne que Ali est le wali d'Allah ", date même de l'époque omeyyades, et le considère comme une réaction de la part des chiites à l'égard de ceux qui maudissaient Ali (a) sur les minbars et sur les lieux de l'appel à la prière (ma'dhana)[5].

Il est dit aussi que Abd Allah al-Maraghi al-Misri a cité des hadiths dans son livre, as-Silâfa fi amr al-khilâfa, selon lesquels Salman et Abû Dhar al-Ghifârî récitaient déjà le Troisième Témoignage à l'époque du Prophète (s) lui même"[6] Cependant, certains ont douté de l'existence du livre en question.

Désaccords sur la décision jurisprudentielle

Selon la jurisprudence chiite (fiqh), la phrase "Je témoigne que Ali est le wali d'Allah" (اَشْهدُ اَنَّ علیاً ولی‌ُّ الله) n'a pas été considérée comme légitime à l'origine, et ne faisait pas partie d'adhân. Ainsi, les jurisconsultes chiites ne l'ont pas mentionné comme faisant partie d'adhân ou d'iqâma[7], et ils sont en désaccord sur la décision jurisprudentielle de la récitation du Troisième Témoignage en adhân ou iqâma.

Voici les points de vue jurisprudentiels à cet égard :

  • ll n'est pas permis de réciter le Troisième Témoignage en adhân et en iqâma : Cheikh as-Sadûq pensait que les hadiths impliquant la permission de réciter le Troisième Témoignage en adhan ou en iqama sont fabriqués par les ghulât (personnes qui exagèrent sur la position des Imams des chiites)[8]. Selon Cheikh at-Tûsî, ces hadiths sont des shadhdhs, et celui qui récite le Troisième Témoignage en adhân ou en iqâma commet un péché [9]
  • Il est permis même recommandé de réciter le Troisième Témoignage en adhân ou en iqâma à condition de ne pas croire qu'il en fait partie[10]. Abd al-Halîm al-Ghizzî a rassemblé les fatwas de plus de 100 savants chiites à cet égard dans son livre ash-Shahâdat ath-Thâlitha al-Muqaddasa, dont la plupart prennent la récitation du Troisième Témoignage en adhân ou en iqâma pour mustahab (acte conseillé) à condition de ne pas penser comme une partie de adhân ou de iqâma[11]. Ils font appel aux hadiths généraux (c'est-à-dire les hadiths qui ne concernent pas spécifiquement l'adhân et l'iqâma) selon lesquels il faut témoigner de la wilaya de Ali b. Abi Talib (a) chaque fois que l'on témoigne de l'Unicité de Dieu et de la Prophétie du Prophète Muhammad (s)[12] Ces savants prennent les positions de Cheikh as-Sadûq et de Cheikh at-Tûsî pour ce qui concerne uniquement son acceptation comme une partie obligatoire d'adhân.
  • Si le Troisième Témoignage est considéré comme le slogan du chiisme, alors il est obligatoire (wajib) de le réciter : Sayyid Muhsin al-Hakim croit qu'il est de la responsabilité des musulmans (chiites) de réciter le Troisième Témoignage en adhân et en iqâma à condition que celui qui le récite ne le prenne pas comme partie intégrante de ceux-ci. Il croit qu'à notre époque, le Troisième Témoignage est le slogan du chiisme, et qu'il est donc nécessaire ou même obligatoire de le réciter en adhân et en iqâma [13].
  • Le Troisième Témoignage fait partie d'adhân ou d'iqâma : un certain nombre de juristes chiites affirment que le Troisième Témoignage fait partie d'adhân et d'iqâma [14]. Ceux-ci font appel aux hadiths mêmes rejetés par Cheikh as-Sadûq et Cheikh at-Tûsî. Certains d'entre eux font appel à des hadiths cités par Maraghi al-Misri selon lesquels Salman al-Farisi et Abû Dhar al-Ghifârî récitaient le Troisième Témoignage en adhân ou iqâma. Toutefois certains chercheurs ont douté de l'existence du livre d'al-Maraghi mentionnant un auteur étant totalement inconnu. Le fait de l'indisponibilité du livre dans les bibliothèques, et l'absence d'un tel hadith dans les autres livres chiites de hadiths, rajoute à ce problème. Certains juristes chiites pensent que c'est un acte musahab (conseillé) de réciter le Troisième Témoignage en adhân ou iqâma, même s'ils ne le prennent pas pour une partie indispensable de celui-ci. Cependant, ils soutiennent qu'il pourrait s'agir d'un acte mustahab, même si on l'entend dans le adhân ou dans le iqâma[15].

Sâhib al-Jawâhir dit :

nous mêmes nous dirions qu'il (c'est-à-dire le Troisième Témoignage) faisait partie d'adhân et d'iqâma, si les savants et les jurisconsultes ne s'étaient pas mis d'accord sur le fait qu'il ne fait pas partie [16].

Dans at-Tashahhhud de la prière et dans confession de la fois au cas de la conversion à l'islam

La question de la récitation du Troisième Témoignage dans at-Tashahhud de la prière n'apparaît pas dans les livres et essais jurisprudentiels et des traités pratiques. Cependant, il apparaît dans certains Istifta' faits par des autorités chiites. Presque toutes les autorités chiites estiment qu'il n'est pas permis de réciter le Troisième Témoignage en at-Tashahhud après ash-Shahâdatayn de la prière journalière [17]. Cependant, certains auteurs font appel aux hadiths généraux selon lesquels il faut témoigner de la wilaya de Ali b. Abi Talib (a), lorsqu'on témoigne de l'Unicité de Dieu et de la Prophétie de Muhammad (s), et ont considéré comme permis la récitation du Troisième Témoignage dans at-Tashahhud[18].

Selon les musulmans, pour se convertir à l'islam, il suffit de réciter ash-Shahadatayn. Selon la jurisprudence chiite, il n'est pas nécessaire non plus, pour la conversion à l'islam chiite, de réciter le Troisième Témoignage. Toutefois, les chiites récitent aussi le Troisième Témoignage pour exprimer leur foi en l'islam.

Voir aussi

Références

  1. Cheikh at-Tabrisî, al-Ihtijâj, vol 1, p 158 ; al-'Allâma al-Majlisî, Bihâr al-anwâr, vol 27, p 1 ; Najafâ, Jawâhir al-kalâm, vol 9, p 87
  2. Hakîm Ilâhî, Shahâdat-i Thâlitha az Bid'at Tâ Wujûb, p 149
  3. Ibn Batûta, Rihlat Ibn Bahûta, vol 1, p 308
  4. Cheikh as-Sadûq, Man lâ Yahduruhu al-Faqîh, vol 1, p 290
  5. As-Sarâwî, al-Qatûf al-Dânîyya, vol 1, p 55
  6. Husaynî Mîlânî, ash-Shahâda bi al-Wilâya fî l-adhân, p 25
  7. Cheikh as-Sadûq, Man lâ Yahduruhu al-faqîh, vol 1, p 290 ; Cheikh at-Tûsî, al-Khilâf, vol 1, p 278 ; Yazdî, al-ʿUrwat al-Wuthqâ, vol 1, p 602
  8. Cheikh as-Sadûq, Man lâ Yahduruhu al-faqîh, vol 1, p 290
  9. Cheikh at-Tûsî, al-Mabsût, vol 1, p 99 ; al-'Allâma al-Hillî, Muntaha al-Matâlib, vol 4, p 381
  10. Al-'Allâma al-Majlisî, Bihâr al-Anwâr, vol 81, p 111 ; Najafî, Jawâhir al-kalâm, vol 9, p 87 ; ayatollah Khomeini, al-Âdâb al-Ma'nawîyya, p 265
  11. Al-Ghizzî, Ash-Shahâdat ath-Thâlitha, p 361-385
  12. Cheikh at-Tabrisî, al-Ihtijâj, vol 1, p 158 ; al-'Allâma al-Majlisî, Bihâr al-Anwâr, vol 27, p 1 ; Najafî, Jawâhir al-kalâm, vol 9, p 87
  13. Al-Hakîm, Mustamsak al-'Urwat al-Wuthqâ, vol 5, p 545
  14. Al-Ghizzî, Ash-Shahâdat ath-Thâlitha, p 361-385
  15. Al-'Allâma al-Majlisî, Biḥâr al-anwâr, vol 81, p 111 ; al-Ghizzî, Ash-Shahâdat ath-Thâlitha, p 361-385
  16. Najafî, Jawâhir al-kalâm, vol 9, p 87
  17. Ayatollah Khomeini, Istiftâ'ât, vol 1, p 167
  18. Hakîm Ilâhî, Shahâdat-i Thâlitha az Bid'at tâ Wujûb, p 145

Bibliographie

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  • Al-‘Allâma al-Hillî, Hsan b. Yûsuf b. Mutahhar, Muntah al-Matlab fî Tahqîq al-Madhab, chercheur : la partie du Fiqh de Jâmi’I Pajûhishhâyi Islâmî, Meched, Majma’ al-Buhûth al-Islâmîyya,
  • Al-‘Allâma al-Majlisî, Muhamad Bâqir, Bihâr al-Anwâr al-Jâmi’a li Durar Akhbâr al-At’hâr, Beyrouth, Ihyâ’ at-Turâth al-Arabie
  • Al-‘Izzî, Abd al-Halîm, ash-Shahâdat ath-Thâlitha al-Muqadassa, Beyrouth, Dâr al-Qârî, 1423 H
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  • Cheikh at-Tûsî, Muhammad b. Hasan, al-Khilâf, correcteurs : Qli Khurâsânî, Sayyid Jawâd Shahristânî, Mahdi Tâhâ Najaf et Mujtabâ ‘Arâqî, Daftar Intishârât Islâmî sous la supervision de Jâmi’I Mudrrisîn de Hawza de Qom, 1407 H
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  • Ibn Batûta, Safarnâmi (Rihla) Ibn Batûta, traduction de Muhammad Ali Muwahhid, Téhéran, Bungâhi Tarjumi wa Nashr Kitâb, 1395 HS
  • Kadîwar, Muhsin, Naqd Mustanadât Shahâdat Thâlitha Dar Adhân, La site de Muhsin KAdîwar, 1392 HS
  • Mihrizî, Mahdi, Padîdi Irjâ’ bi Kitâbhâhi Khîyâlî wa Sâkhtigî, La site de bibliothèque de Târîkh aIslâm wa Irân, 1393 HS
  • Najafî, Muhammad Hasan, Jawâhir al-Kalâm fî Sharh Sharâ’I al-Islâm, chercheur et correcteur : Abbâs Qûchânî et Ali Âkhûndî, Beyroute, Dâr Ihyâ’ at-Turâth al-Arabie, vol 7, 1404 H
  • Shahristânî, Sayyid Ali, Jaygâh Ashhadu Anna Aliyan Walî Allah Dar Adhân, Traduction de Sayyid Hâdî Husaynî, Qom, Dalîl Mâ, 1388 HS.
  • Shûshtarî, Muhammad Taqî, an-Naj’at fî Sharh al-Lum’a, Téhéran, librairie de Sadûqî,
  • Yazdî, Sayyid Muhammad Kâzim, al-‘Urwat al-Wathqâ Fîmâ Ta’ummu bihi al-Balwâ, Beyrouth, institut al-A’lamî li al-Matbû’ât, 1409 H.