Uthmanites
Uthmanites ou ‘Uthmanites ou al-‘Uthmânîyya (en arabe : العثمانية) furent une secte qui, après le meurtre d'Othman b. Affan, refusa de prêter allégeance au Prince des croyants, l'Imam Ali (a) ou rompit son allégeance envers lui, et considéra Muawiya comme calife après Othman. La secte ‘Uthmânîyya cherchait à s'opposer à l'Imam Ali (a) et aux Ahl al-Bayt (a) dans les domaines politique, militaire et scientifique. L'apparition du terme « Uthmanite » face au terme « chiite » serait liée à la bataille du Chameau.
Les chercheurs estiment que, sur le plan politique et militaire, les Uthmanites imposèrent les batailles du Chameau et de Siffîn à l'Imam Ali (a) et à ses compagnons. De même, durant la période des Uthmanites, outre la guerre directe contre les chiites, ils maudissaient et insultaient la Famille immaculée du Prophète (s) c’est-à-dire les Ahl al-Bayt (a), tuaient, emprisonnaient et exilaient les chiites. La dernière information dont on dispose sur les Uthmanites date du 4e siècle de l’Hégire.
Dans les différents domaines scientifiques de l'islam, dont le hadith, la jurisprudence, la théologie et l'histoire, les ‘Uthmanites eurent une influence. Leur tendance dominante dans ces sciences fut de présenter une nouvelle interprétation de l'islam basée sur la vision doctrinale et politique de l’époque des trois califes et du califat de Muawiya. La formation de savants hostiles au Prince des croyants, l'Imam Ali (a), et aux Ahl al-Bayt (a) compte parmi les caractéristiques importantes de la période de domination scientifique des Uthmanites.
Uthmanites, une secte opposée à l'Imam Ali (a)
Les Uthmanites étaient une secte qui, après l’assassinat d’Othman b. Affan, refusa de prêter allégeance à l'Imam Ali (a)[1] ou rompit son allégeance envers lui.[2]
Cette secte comprit les Sahaba comme Talha, Zubair, Aïcha et Muawiya.[3] Selon Wilferd Madelung et certains historiens, la caractéristique la plus importante du courant dominant des Uthmanites fut l'opposition à l'Imam Ali (a)[4] et la croyance en l'illégitimité de son califat.[5] Les Uthmanites tinrent Muawiya pour calife après Othman en raison de sa parenté avec Othman et de sa priorité en tant que vengeur d'Othman.[6]
Tout au long de son existence, les Uthmanites s’efforcèrent de s’opposer au Commandeur des croyants l'Imam Ali (a) et aux Ahl al-Bayt (a) dans les domaines politique, militaire et scientifique.[7] Sur le plan politique, les Uthmanites imposèrent les batailles de Jamal et de Siffin à l'Imam Ali (a) et à ses chiites.[8] Bien que les Uthmanites furent défaits à la bataille de Jamal, ils parvinrent à convertir les gens de Bassora à la doctrine des Uthmanites et après la bataille de Siffîn, ils dominèrent l’Irak et établirent leur croyance dans le califat des Omeyyades.[9]
Avec la consolidation politique des Uthmanites à l’époque des Omeyyades, outre la guerre directe contre les chiites, ils maudissaient et insultaient les Ahl al-Bayt (a), tuaient, emprisonnaient et exilaient les chiites et les sunnites qui rapportaient les mérites des Ahl al-Bayt (a).[10] Pour cette raison, certains considèrent les Uthmanites parmi les Nâsibî.[11]
La dernière information dont on dispose sur cette secte dans les sources historiques[12] concerne quelques rapports sur des tendances des Uthmanites au 4e siècle de l’Hégire.[13]
Nomination et historique
L’apparition du terme « Uthmanites » ou « ‘Uthmânîyya » est liée à la bataille du Chameau.[14] Les chercheurs estiment qu’à cette époque, le terme « religion d’Othman » fut forgé.[15] Lors de la bataille de Siffin, certains poètes présents dans l’armée de Mawiya appelèrent les soldats de Muawiya les « partisans de la religion d’Othman ».[16] En revanche, Rifa’a Ibn Shaddâd, compagnon de l'Imam Ali (a), s’appela dans ses poèmes "partisan de la religion d’Ali".
Lorsqu'Othman commit des actes indignes d'un calife musulman, s'opposant catégoriquement à la tradition du Prophète Muhammad (s) et même à celle des Shaykhâyn, certains musulmans se révoltèrent contre lui. Cette révolte aboutit finalement à l'assassinat d'Othman. Aussi, les mêmes musulmans ne permirent pas qu’Othman soit enterré au cimetière d’al-Baqî‘, le cimetière des musulmans et il fut enterré au cimetière de Hushsh Kawkab, le cimetière ds juifs.[17]
À cette époque, alors qu’un certain nombre de musulmans s’opposaient à Othman, les Omeyyades le soutenaient. Quoi qu’il en soit, Othman fut tué et enterré dans ces conditions. Après Othman, de nombreuses personnes se tournèrent vers le Prince des croyants, Ali (a) pour qu’il accepte le califat.
Dans cette situation, les partisans d'Othman, ou disons plutôt les opposants à l’Imam Ali (a), qui avaient trouvé dans le sang d'Othman un bon prétexte pour leur opposition, refusèrent de lui prêter allégeance. At-Tabarî cite le nom de certains de ces individus. Il écrit :
- « Quand Othman fut tué, les Ansar prêtèrent allégeance à Ali, à l’exception d’un petit nombre d’entre eux, dont Hassân b. Thâbit, Ka‘b b. Mâlik, Maslamat b. Mukhallad, Abû Sa‘îd al-Khudrî, Muhammad b. Maslama, an-Nu‘mân b. Bashîr, Zayd b. Thâbit, Râfi‘ b. Khudayj, Fadâlat b. ‘Ubayd et Ka’b b. ‘Ujra. Tous étaient Uthmanites. »[18]
Avec l'aide de Muawiya, ils incitèrent Aicha et lancèrent les batailles du Chameau, puis de Siffîn. Plus tard, la phrase « les partisans de la religion d'Othman » demeura pendant plusieurs siècles le slogan des Uthmanites. L'utilisation de l'expression « religion d'Othmân » par l'armée de ‘Umar b. Sa‘d lors de l'événement de Karbala fut également observée.[19] Bien que les Uthmanites n'aient pas duré plus de quatre siècles de l’Hégire avant de disparaître, on peut clairement observer l'influence de leur pensée pendant encore plusieurs siècles.
Les chercheurs croient que, dans les périodes ultérieures, cette tendance fut nommée sous le nom de « Uthmanites » ; par exemple, des signes de l’utilisation de ce terme avant 145 H (763 C). furent trouvés.[20] Dans certaines sources, les Uthmanites sont également appelés les « compagnons de ‘Uthmânîyya ».[21]
Histoire
L’histoire des Uthmanites est divisée en quatre périodes[22] :
Croyance en la légitimité du califat d’Othman
La caractéristique de la première période des Uthmanites serait la croyance en la légitimité du califat d’Othman et au caractère injuste de son meurtre,[23] l’illégitimité du califat du Commandeur des croyants Ali (a) en raison de sa participation au meurtre d’Othman[24] et de son usurpation du califat sans consulter la communauté.[25]
Cela alors que, selon les sources sunnites, sur ordre de l'Imam Ali (a), l'Imam al-Hasan (a) protégeait la maison d'Othman avec Abd Allah b. az-Zubayr et Marwan b. al-Hakam.[26]
Othman demanda à l'Imam Ali (a), à Talha, à az-Zubayr et aux épouses du Prophète (s) de lui apporter de l'eau.[27] L'Imam (a) et Umm Habîba, l’épouse du Messager de Dieu (s), furent les premiers à tenter de lui en apporter, mais les gens les en empêchèrent.[28] Après avoir bloqué l'accès à l'eau et à la nourriture, le Commandeur des croaynts Ali (a) condamna les gens, affirmant que leurs actes ne ressemblaient à ceux ni des croyants ni même des mécréants, et leur demanda pour quelle raison ils considéraient comme licite le siège et le meurtre d'Othman.[29]
Durant cette période, le déclenchement des batailles de Jamal et de Siffîn,[30] l’usurpation du califat par Umar et Abû Bakr et l’établissement du gouvernement omeyyade,[31] les injures envers l'Imam Ali (a),[32] l’assassinat de l’Imam al-Hasan (a),[33] le refus de l’enterrer auprès du Prophète (s),[34] l’événement de Achoura[35] et la pression sur les chiites[36] sont considérés comme des activités politiques des Uthmanites.
Parmi les personnalités influentes des Uthmanites durant cette période, outre Talha, az-Zubayr, Muawiya et Aicha, on peut mentionner Abd Allah b. Salâm et al-Mughîrat b. Shu‘ba qui refusèrent de prêter allégeance à l'Imam Ali (a) et s’enfuirent rejoindre Muawiya à al-Cham.[37] Parmi les Ansar, Hassân ibn Thâbit, Ka’b b. Mâlik, Abû Sa‘îd al-Khudrî, Muhammad b. Maslama, an-Nu’mân b. Bashîr et Zayd b. Thâbit qui, contrairement à la majorité des Ansar, refusèrent de prêter allégeance à l'Imam Ali (a), sont mentionnés.[38]
Théorie des trois califes
Au cours de la deuxième période, qui coïncide avec la période des Marwanides, les gens de hadith limitèrent les califes aux trois premiers califes.[39] On dit que les Uthmanites de cette période préféraient garder le silence sur le calife après Othman et considéraient le califat de l'Imam Ali (a) comme une période de discorde.[40] Les Uthmanites de cette période considéraient des personnes comme Abd Allah b. Umar et Sa‘d b. Abî Waqqâs qui, selon eux, s’étaient tenus à l’écart de la discorde, comme leurs coreligionnaires et de tendance des Uthmanites.[41]
Théorie des quatre califes
Au cours de la troisième période, les Uthmanites comprenaient toute personne qui affirmait la supériorité d’Othman sur le Prince des croyants Ali (a) et considérait chaque calife comme le plus méritant de son époque.[42] L’établissement de cette théorie à cette époque est attribué à la consolidation de la théorie des quatre califes, au milieu du 3e siècle de l’Hégire, avec la tendance d’Ahmad b. Hanbal à celle-ci.[43]
Soutien aux Omeyyades
Selon certains, avec la disparition des gens de hadith soutenant les Uthmanites à la fin du 3e siècle, un groupe devint connu sous le nom d’Uthmanites qui crut en la légitimité du califat des Omeyyades et à sa continuation des Omeyyades d’al-Andalus.[44] il se fait allusion à la présence des Uthmanites au 4e siècle qui avaient leur propre mosquée à Koufa et que les chiites évitaient d’y prier.[45]
Oeuvres des Uthmanites dans les sciences islamiques
Dès le début de son apparition, les Uthmanites eurent des ouevres dans différents domaines scientifiques de l’islam, dont le hadith, le fiqh, la théologie et l’histoire.[46] La vision dominante des Uthmanites dans ces domaines fut de présenter une nouvelle interprétation de l’islam basée sur la vision doctrinale et politique de l’époque des trois califes des sunnites et du califat de Muawiya.[47]
La formation de savants hostiles à l'Imam Ali (a) et aux Ahl Bayt (a) compte parmi les caractéristiques importantes de la période de domination scientifique des Uthmanites.[48]
Hadith et fiqh
Selon les rapports historiques, les savants uthmanites étaient actifs dans les centres scientifiques du monde musulman aux premiers siècles de l’Hégire, dans le domaine du hadith et de le fiqh.[49] Ces centres sont, par ordre de priorité : Médine, Bassora, Koufa, La Mecque et Damas.[50]
Médine
À Médine, les Sahaba les plus importants pour les sunnites étaient considérés comme Uthmanites[51] ; parmi lesquels Aicha,[52] Abd Allah b. Umar[53] et Abû Hurayra.[54]
D’après les chercheurs, la tendance dominante parmi les juristes et Muhaddith uthmanites de Médine était de rapporter les mérites fabriqués des trois premiers califes et de manifester leur hostilité envers le Commandeur des croyants Ali (a).[55] Certains des sept juristes de Médine[Note 1][57] avaient des degrés variables de tendance uthmanites.[58]
Bassora
La tendance dominante de la population de Bassora était uthmanites.[59] Anas b. Mâlik[60] et Muhammad b. Sîrîn (m. 110 h / 729 c)[61] sont considérés comme les juristes et Muhaddiths uthmanites les plus célèbres de Bassora.[62] La tendance dominante des juristes uthmanites de la ville de Bassora est considérée comme étant de garder le silence sur l'Imam Ali (a).[63]
Koufa
Malgré la prédominance des chiites et des sunnites proches des chiites à Koufa, la présence de juristes avec tendance uthmanite comme Shaqîq b. Salama (m. 82 h / 701 c)[64] y est mentionnée.[65]
Mecque
Certains juristes de La Mecque, dont Maymûn b. Mihrân (m. 116 h / 734 c),[66] sont considérés comme uthmanites. [67]
Cham
De nombreux juristes d’al-Cham sous le pouvoir des Omeyyades avaient une tendance uthmanite, et qu’un grand nombre de hadiths fabriqués sur les mérites des Omeyyades leur sont attribués.[68]
Histoire
Dans le domaine de l’historiographie, les chercheurs mentionnent l’existence d’une « école historique uthmanite ». Ils estiment que les historiens uthmanites sous le patronage des Omeyyades, en falsifiant l’histoire, s’efforcèrent de donner une légitimité aux Omeyyades.[69] Cet événement fit que les rapports des historiens uthmanites acquirent une remarquable influence dans le domaine de l’histoire.[70]
On considère que la caractéristique de l’école historique uthmanite fut l’hostilité envers l'Imam Ali (a), sous la forme de l’abstention de rapporter ses mérites et de l’invention de hadiths le blâmant, de même que d’inventer des mérites pour Othman et certains autres compagnons, et de s’opposer aux Ansar et de s’abstenir de rapporter leurs mérites.[71] Abân b. Othman et Sayf b. Umar at-Tamîmî sont considérés parmi les historiens de l’école historique uthmanite. L’école historique uthmanite déclina au 3e siècle, avec le renforcement des historiens chiites.[72]
Théologie
Un des domaines importants de la controverse théologique entre les Uthmanites et leurs opposants est rapporté dans le livre « Maqâlât al-‘Uthmânîyya » (les articles uthmanites) écrit par Jahiz (160 / 777 - 255 h / 869 c). Ce dernier, dans ce livre, place la théologie uthmanite face à la théologie chiite. Dans ce livre, il rapporte en détail les arguments des Uthmanites contre les arguments des Imamites sur la question de l’Imamat, la nécessité de nomination de l’Imam par Allah[73], la supériorité du Prince des croyants Ali (a), et la légitimité de l'Imam Ali (a) dans les batailles du Chameau, de Siffîn et de Nahrawân.
Al-Mas‘ûdî mentionne un livre des Uthmanites intitulé « al-Barâhîn fî al-Imâmat al-Umawîyyîn » (les preuves sur le califat des Omeyyades), dans lequel le califat des Omeyyades est défendu.[74] Selon le rapport d’al-Mas‘ûdî, dans ce livre, le califat des Omeyyades d’al-Andalus est considéré comme la continuation du califat d’Othman et de califat des Omeyyades.[75]
Note
- ↑ Les sept juristes contemporains résidant à Médine, qui faisaient partie des Tâbi‘ûn, sont : Sa‘îd b. al-Musayyib (mort en 91 h / 710 c), Abû Bakr b. Abd ar-Rahmân al-Makhzûmî (mort en 94 h / 713 c), ‘Urwat b. az-Zubayr (mort en 94 h / 713 c), ‘Ubayd Allah b. Abd Allah al-Makhzûmî (mort en 98 h / 717 c), Khârijat b. Zayd al-Ansârî (mort en 99 h / 718 c), Sulaymân b. Yasâr (mort en 107 h / 726 c) et al-Qâsim b. Muhammad b. Abî Bakr (mort en 108 h / 727 c).[56]
Références
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